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Combat de deux cavaliers, faubourg Saint-Antoine sous les murs de la contre-escarpe de la Bastille.

Combat de deux cavaliers, faubourg Saint-Antoine sous les murs de la contre-escarpe de la Bastille.

Date représentée :

H. : 50

L. : 72,5

Huile sur toile

Domaine : Peintures

© Photo RMN - Grand Palais (Château de Versailles) / Droits réservés

http://www.photo.rmn.fr

90-000078 / MV6818

La Fronde

Date de publication : Novembre 2012

Auteur : Jean HUBAC

La Fronde des princes et le contrôle de Paris

Depuis 1648, le ministère du cardinal Mazarin, appuyé par la régente Anne d’Autriche, mère du jeune Louis XIV, se heurte à l’hostilité du Parlement de Paris, qui s’estime en position de force pour arracher une extension de ses compétences, puis à celle de certains princes, qui considèrent être en capacité de participer à la gestion du royaume. En mars 1649, la Fronde parlementaire prend fin. Cependant, les grands seigneurs se considèrent mal gratifiés de leur aide au gouvernement royal et se révoltent à leur tour. Cette Fronde dite « Fronde des Princes » prend des aspects de guerre civile et est marquée par de nombreux événements et changements d’alliance de la part des grands seigneurs.

En 1652, Paris redevient un enjeu stratégique majeur. Le prince de Condé tente de fédérer les divers « partis » de la Fronde. Son armée se rapproche de Paris, mais le Parlement, pourtant majoritairement hostile à Mazarin, refuse de lui en ouvrir les portes. Condé longe les remparts de la capitale lorsque les armées royales des maréchaux Turenne et La Ferté l’attaquent le 2 juillet, près de la porte Saint-Antoine. Un combat disproportionné s’engage dans un milieu fortement urbanisé : l’armée de Condé ne trouve son salut – au prix de nombreuses pertes – que dans le courage de son chef et surtout dans l’initiative de la Grande Mademoiselle, cousine du roi, qui fait ouvrir la porte Saint-Antoine et tirer les canons de la Bastille contre les soldats royaux. C’est ce combat que l’artiste anonyme représente, sous l’aspect d’un affrontement des cavaleries. On peut supposer qu’il s’agit d’une commande de l’entourage royal célébrant, non sans équivoque, le dernier combat significatif de la Fronde.

Les combats du faubourg Saint-Antoine

La composition fait apparaître deux scènes distinctes. Au premier plan, un duel oppose deux cavaliers tandis qu’un troisième est à terre. À l’arrière-plan, un combat de cavalerie tourbillonnant se perd dans un nuage de poussière. La contre-escarpe de la Bastille – dominée par l’imposante silhouette de la forteresse – sert de support à la lecture du tableau, de droite à gauche, et bouche l’horizon, transformant ainsi le lieu en un théâtre où l’action fait rage. Un porte-étendard, situé au centre de la composition, fait le lien. L’artiste a voulu rendre compte de la violence des combats, de la rapidité de l’action en raison du heurt des cavaleries condéenne et royale, de la personnalisation d’affrontements qui ont vu de nombreux nobles disparaître (parmi eux, le duc de Nemours ou le neveu de Mazarin). Le choix de représenter la Bastille – même si ses canons ne tonnent pas ici – et non les maisons du faubourg Saint-Antoine, où les combats se sont essentiellement déroulés, sert le projet d’ennoblissement de la représentation de la guerre civile : la cavalerie est le plus prestigieux des corps, dans lequel servent de nombreux nobles.

Le spectacle de la guerre civile

Le champ de bataille est transformé par l’artiste en scène de théâtre que le spectateur contemple comme le lieu d’une action tragique où les héros s’affrontent. Cette journée devait être celle de l’anéantissement de l’armée condéenne, déclarée rebelle à l’autorité royale. Le roi et son entourage avaient d’ailleurs pris place sur les hauteurs de Charonne, afin de regarder les combats. La reprise artistique d’un des combats de la Fronde, épisode douloureux de la jeunesse de Louis XIV, est sans doute à lier à la valorisation de Condé, qui fit preuve le 2 juillet 1652 d’une bravoure reconnue dans les deux camps. Les combats du faubourg Saint-Antoine sont aussi les derniers de la Fronde autour de Paris. Le 4 juillet, les « princes » tentent un coup de force contre l’Hôtel de Ville pour s’allier les Parisiens, mais ne parviennent qu’à alimenter la méfiance à leur égard et à renforcer le camp des partisans du gouvernement légitime. Alors que les ralliements au roi – majeur depuis le 7 septembre 1651 – se multiplient, Condé quitte Paris le 14 octobre et se met au service de l’Espagne. Louis XIV fait son entrée dans la capitale le 21 octobre 1652. La Fronde parisienne a vécu, mais le roi en garde une méfiance traumatique envers la capitale et la haute noblesse. La victoire du roi est un des thèmes privilégiés de la propagande d’État autour de la pacification du royaume par Louis XIV.

BERTIÈRE Simone, Condé, le héros fourvoyé, Paris, Éditions de Fallois, 2011.

DESCIMON Robert, JOUHAUD Christian, La France du premier XVIIe siècle (1594-1661), Paris, Belin, 1996.

PERNOT Michel, La Fronde, Paris, Éditions de Fallois, 1994.

RANUM Orest, La Fronde, Paris, Le Seuil, 1995.

Jean HUBAC, « La Fronde », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 19/03/2024. URL : histoire-image.org/etudes/fronde

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