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Les Carlos au Cirque Médrano

Les Carlos au Cirque Médrano

Les Marcès au Cirque Pinder

Les Marcès au Cirque Pinder

Henriquas Rubio équilibriste au Cirque d'Hiver

Henriquas Rubio équilibriste au Cirque d'Hiver

Les Carlos au Cirque Médrano

Les Carlos au Cirque Médrano

Date de création : 1916

Date représentée : 23 mars 1916

H. : 29,9 cm

L. : 20,2 cm

Aquarelle, encre noire, mine de plomb sur papier

Domaine : Dessins

© Photo RMN - Grand Palais - F. Raux / Droits réservés

http://www.photo.rmn.fr

09-520520 / 68.102.208C

Les sœurs Vesque et le cirque

Date de publication : Novembre 2010

Auteur : Alexandre SUMPF

Le cirque en images

De 1902 à 1948, Marthe Vesque (1879-1962) et sa sœur Juliette Vesque (1881-1949) ont vu un spectacle de cirque presque chaque semaine, avec le projet d’en réaliser une histoire illustrée. Dessinatrices et peintres, elles laissent un journal et une œuvre graphique qui constituent une véritable chronique de la vie sous les chapiteaux plantés dans la proche banlieue de Paris.

Toujours signées « M. J. V. », les planches des deux sœurs constituent ainsi une mine de renseignements sur les acteurs, les lieux, les numéros, le monde du cirque et son évolution pendant près d’un demi-siècle. Au fil des spectacles, elles ont réalisé plus de 8 000 esquisses et dessins d’inspiration naturaliste, qui se caractérisent par leur précision et leur réalisme. Mais au-delà de sa richesse documentaire, leur travail présente aussi un intérêt artistique évident. À une époque où de grands artistes se montrent sensibles aux promesses esthétiques du cirque, les sœurs Vesque posent elles aussi un regard neuf et original sur ce monde en pleine mutation. C’est sans doute pour cette raison qu’en 1977, un ensemble de plus de 200 dessins, choisis dans les œuvres léguées au musée national des Arts et Traditions populaires, a été réuni dans l’album Le Cirque en images, dont sont extraits Les Carlos au Cirque Medrano, Les Marcès au Cirque Pinder et Henriquas Rubio équilibriste au Cirque d’Hiver.

Le cirque en mouvements

Comme toujours contemporains des spectacles auxquels les sœurs Vesque ont assisté, les dessins Les Carlos au Cirque Medrano, Les Marcès au Cirque Pinder et Henriquas Rubio équilibriste au Cirque d’Hiver sont respectivement datés de mars 1916, de juillet 1921 et d’octobre 1924. Le trait à la fois incisif, léger et précis sert l’étude admirable du mouvement et des évolutions. Associées au parti pris d’un fond clair et quasiment vierge, les couleurs fines et minces de l’aquarelle ajoutent à la délicatesse de l’ensemble, aérien et doux.

Le dessin Les Carlos au Cirque Medrano montre une femme et deux hommes vêtus du même costume vert bouteille : les artistes d’une même « famille » portent souvent des tenues identiques, qui affirment leur identité par rapport aux autres formations de la troupe et qui soulignent l’esprit de corps qui les anime – la performance est celle du collectif, puisque chacun dépend de ses partenaires lors du spectacle. Le dessin représente un moment particulièrement crucial du numéro qu’exécutent les funambules : debout au centre de la piste circulaire dont le bord apparaît loin derrière lui, un homme redresse d’un bras une longue perche au bout de laquelle l’autre homme, un pied passé dans une sangle, se maintient presque à l’équerre au-dessus du vide, bras tendus en avant pour assurer son équilibre. La femme suit le numéro des yeux, debout à côté du tremplin peint aux couleurs de la famille. Les sœurs Vesque ont su exploiter la hauteur de la feuille pour rendre l’altitude à laquelle se trouve le funambule.

Les Marcès au Cirque Pinder représente divers moments d’un numéro de trapèze exécuté par des artistes tous vêtus du même costume noir et blanc. Les sœurs Vesque y ont étudié le saisissement du trapèze (à droite), l’arrivée dans le filet (en bas), les voltiges et les acrobaties des trapézistes (en haut et à gauche).

Parce que le dessin ne met en scène qu’un seul personnage, Henriquas Rubio, et parce qu’il comporte plus de figures (au sens propre et figuré), Henriquas Rubio équilibriste au Cirque d’Hiver donne aussi l’impression d’une étude décomposée du mouvement. Groupés en séries horizontales, les dessins de cette planche reproduisent le déroulement chronologique des acrobaties de l’équilibriste, procédé qui la rapproche des célèbres chronophotographies réalisées par Muybridge à la fin du XIXe siècle. Henriquas Rubio, qui a fait de ses origines espagnoles sa « marque », porte son habituel costume de torero, rendu dans ses moindres détails.

Poétique du cirque

Ces trois dessins résultent du processus qu’ont toujours suivi les sœurs Vesque : d’abord des croquis au crayon et à la plume pris sur le vif depuis les gradins, souvent dans le noir. À ce travail d’observation directe et réalisé « sur place » succède une phase de mise au net lors de laquelle elles s’aident de mannequins très souples qu’elles ont elles-mêmes conçus pour mieux étudier les mouvements. Parfois, des artistes de cirque acceptent de poser ou de reprendre certaines positions pour elles. Pour finir, les compositions sont retravaillées à l’aquarelle. L’attention très poussée que Marthe et Juliette Vesque portent aux costumes, aux évolutions et aux enchaînements caractérise nettement ces trois dessins aquarellés.

Cependant, l’étude réaliste et minutieuse des corps recèle aussi une certaine poésie, qui doit autant au sujet représenté qu’à la manière presque amoureuse dont les sœurs Vesque le traite. Les attitudes sont gracieuses, les mouvements fluides, et les personnages semblent en apesanteur. Ainsi incarnent-ils la dimension merveilleuse du cirque, qui transfigure ses artistes en une matière dansante (voir Henriquas Rubio équilibriste au Cirque d’Hiver), légère et aérienne.

Une poésie qui est donc aussi profondeur, avec çà et là des perspectives d’ordre métaphysique sur la matière, la chair, le corps et sa représentation, le corps et ses déplacements. Par exemple, dans Les Carlos au Cirque Medrano, le funambule « épouse » (bras tendus, il semble prêt à s’y jeter) littéralement un vide en apparence infini et évoque ainsi un rapport troublant au néant et à la mort, ou au moins à l’immensité de l’espace dans lequel il évolue.

Bernadette BOUSTANY, En piste ! Le cirque en images des sœurs Vesque, Paris, Gallimard, coll. « Découvertes Gallimard albums », 1992.

Pascal JACOB, La Grande Parade du cirque, Paris, Gallimard, 2001.Le Cirque dans l’univers n° 169, 2e trimestre 1993.

Jacques LECOQ, Le Corps poétique : un enseignement de la création théâtrale, Arles, Éd.Actes Sud-Papiers, 1997.

Album Marthe et Juliette Vesque / Le Cirque en images, dessins présentés par Édith Mauriange et Paul Bouissac, Paris, G.-P.Maisonneuve et Larose, 1977.

Alexandre SUMPF, « Les sœurs Vesque et le cirque », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 19/03/2024. URL : histoire-image.org/etudes/soeurs-vesque-cirque

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