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La folle monomane du Jeu.

La folle monomane du Jeu.

La folle monomane de l'Envie.

La folle monomane de l'Envie.

La folle monomane du Jeu.

La folle monomane du Jeu.

Lieu de conservation : musée du Louvre (Paris)
site web

Date de création : 1822

Date représentée :

H. : 77 cm

L. : 64,5 cm

peinture à l'huile sur toile

Domaine : Peintures

© Photo RMN - Grand Palais - G. Blot

http://www.photo.rmn.fr

91EE1563/RF 1938-51

Regard sur la folie

Date de publication : Mars 2016

Auteur : Nadine FATTOUH-MALVAUD

Ces deux toiles appartiennent à un ensemble de dix portraits d’aliénés (dont cinq actuellement perdus ou détruits) peints par Géricault vers 1820.

L’exécution de ces œuvres semble faire suite à une crise de dépression nerveuse dont a souffert l’artiste à l’automne 1819. Une dépression survenue après les mois de travail intensif pour la réalisation du Radeau de La Méduse (1819, musée du Louvre) et les mauvaises critiques qu’il a engendrées. Géricault aurait alors été soigné par le docteur Georget, pour lequel il a réalisé ces toiles.

Les titres de ces œuvres révèlent la classification opérée à l’époque des différentes formes de folie. Elles portaient alors le nom de « manies » ou « monomanies », évoquant la fixation psychique et obsédante d’un malade sur un objet unique. Cette classification, abandonnée dans la seconde moitié du XIXe siècle, donna naissance à d’autres appellations, telles que « délire de persécution », « folie des grandeurs », « délire de jalousie »…

Mais ces images de la folie ne sont pas les premières de l’histoire de l’art (cf. Goya). Ce thème devait, de plus, connaître un grand développement avec la génération romantique à laquelle appartenait Géricault. Toutefois, la particularité de ces toiles réside dans le fait qu’il s’agit de la première représentation quasi scientifique de malades mentaux en peinture ; comme si Géricault procédait à une sorte d’analyse clinique des personnages.

Les deux « monomanes » sont représentées assises, de face, à mi-corps et sur un fond sombre. Aucun accessoire ou détail superflu ne vient charger la composition ou distraire le regard du spectateur ; celui-ci se dirige immanquablement vers le visage du personnage et vers son regard vide. Détail qui nous rappelle qu’au XIXe siècle, l’étude de la folie était largement liée à la phrénologie et à la physiognomonie.

Par ailleurs, ces deux portraits d’aliénés (tout comme les huit autres de la série) sont d’un réalisme remarquable, doublé d’une grande objectivité dans l’observation. Ce qui a poussé les historiens à avancer plusieurs hypothèses. Une première selon laquelle le docteur Georget aurait proposé l’exécution de ces toiles à Géricault à des fins thérapeutiques (pour le guérir de sa dépression). Et une seconde, plus convaincante, selon laquelle le docteur Georget aurait commandé ces toiles, à l’artiste guéri, pour illustrer ses théories et ses démonstrations, ce qui lui évitait d’amener les malades dans les amphithéâtres où il enseignait.

Quel qu’ait été le but de ces portraits, ils sont indéniablement des documents uniques sur un moment de l’histoire de la psychiatrie et de l’appréhension de la folie.

En effet, on assiste alors à une mutation essentielle dans le traitement des fous, désormais considérés comme des malades et soignés comme tels – et non plus comme des éléments de trouble à l’ordre public. Le docteur Georget (1795-1828), à la suite de son maître, Étienne Esquirol (1772-1840), est de ceux qui favorisent cette évolution.

Ce progrès est cependant atténué par le fait que le diagnostic de la folie se trouve alors lié à la physiognomonie et à la phrénologie. La physiognomonie, dont les bases scientifiques remontent aux travaux de Lavater au XVIIIe siècle et qui a dominé l’imaginaire populaire dans la première moitié du XIXe siècle, présuppose une correspondance entre le caractère moral et les traits physiques d’une personne. Quant à la phrénologie (qui connaît alors de grands succès), elle repose sur l’idée selon laquelle la source des maladies mentales est le cerveau. Ces deux théories ont été largement dépassées depuis : on sait aujourd’hui qu’il n’y a pas de somatique des maladies mentales, pas plus que de physionomie propre à la folie.

Enfin, ces œuvres annoncent également l’intérêt croissant que suscite l’inconscient (sous l’influence de la psychiatrie) parmi un groupe d’artistes et d’écrivains dans les années 1840-1850 : Baudelaire, Courbet, Gautier, Grandville et Nodier.

G. BAZIN, Théodore Géricault. Étude critique, documents et catalogue raisonné, t. IV, Génie et Folie. Le Radeau de La Méduse et les Monomanes, Paris, Wildenstein Institute, 1994.

T. CROWN, L’Atelier de David. Émulation et Révolution, Paris, Gallimard, NRF, 1997.

COLLECTIF, L’Âme au corps, arts et sciences, 1893-1993, catalogue de l’exposition à Paris, Paris, RMN, 1993.

Nadine FATTOUH-MALVAUD, « Regard sur la folie », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 19/03/2024. URL : histoire-image.org/etudes/regard-folie

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