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Chronophotographie d'un escrimeur

Chronophotographie d'un escrimeur

Chronophotographie d'un perchiste

Chronophotographie d'un perchiste

Chronophotographie d'un coureur

Chronophotographie d'un coureur

Chronophotographie d'un escrimeur

Chronophotographie d'un escrimeur

Date de création : 1902

Date représentée :

H. : 9 cm

L. : 12 cm

Tirage papier d'après négatif sur plaque de verre

Domaine : Photographies

© Collection Iconothèque de l'INSEP

Lien vers l'institution

Le sport et la photographie scientifique

Date de publication : Mars 2007

Auteur : Laurent VÉRAY

Au cours de la seconde moitié du XIXe siècle, la photographie, en tant que pratique professionnelle ou de loisir, suscite un engouement considérable accru par les progrès techniques. Durant la IIIe République, elle atteint sa pleine maturité technique et pratique. Au même moment les activités physiques se développent et rencontrent un succès croissant. Les sociétés de gymnastique se multiplient (vers 1900, l’Union des sociétés de gymnastique de France, fondée en 1873, en compte plus de 800). De même, le sport moderne devient un phénomène social (les associations scolaires sont progressivement remplacées par des clubs civils dont le nombre ne cesse d’augmenter jusqu’en 1914). Les compétitions de course à pied, de tennis, de rugby et de football se multiplient et deviennent de plus en plus populaires. Or, rapidement, ces pratiques intéressent les spécialistes de la prise de vue scientifique. Dès les années 1880, le grand physiologiste Etienne-Jules Marey utilise la photographie pour étudier le mouvement des athlètes, ses sujets expérimentaux. C’est le cas notamment des élèves de l’Ecole normale de gymnastique de Joinville-le-Pont, centre militaire de formation des moniteurs d’éducation physique qui a ouvert ses portes le 15 juillet 1852. En fait, cette rencontre entre l’intérêt scientifique pour le sport et les valeurs dominantes de la Belle Époque s’explique facilement. Le culte voué à la vitesse, à l’énergie et à la performance, correspond en effet à l’avènement du positivisme et du productivisme.

Les deux premiers clichés sont des chronophotographies réalisées par Georges Demenÿ à l’École de Joinville. La première représente un départ de course de vitesse (tirage papier d’après plaque de verre, INSEP, 1902/1907). La seconde représente un saut à la perche (négatif sur plaque de verre de format 9 x 12, INSEP, 1902/1907). Dans les deux cas, les sujets, qui sont des moniteurs de l’École, sont simplement vêtus d’un cache-sexe et d’une paire de chaussures claires afin que les corps se détachent bien sur le fond noir devant lequel ils se déplacent. On distingue nettement les différentes positions des deux athlètes (notamment, pour le perchiste, la course, l’impulsion, le franchissement de la barre et la réception) ainsi que le travail de leurs muscles pendant l’effort. Le document n° 3 (négatif sur verre de format 9 x 12, INSEP, 1902/1907) est un autre type de chronophotographie, dite graphique ou géométrique. Le procédé consiste à recourir à un sujet portant une cagoule ainsi qu’une combinaison de velours noir munie de boutons et de cordons blancs (ou de tiges métalliques) le long des membres. Il s’agit ici d’un escrimeur (le maître d’armes Bazin) effectuant un coup droit avec fente avant. On peut noter les ondulations du fleuret pendant le mouvement, qui forment une sorte d’entrelacs. Le nombre d’images obtenues est supérieur à celui de la chronophotographie classique. Il permet de suivre, par un enchaînement de tracés et une succession de courbes que le cliché rend très apparents, la trajectoire de chaque partie du corps et le jeu des articulations, depuis le début jusqu’à la fin du mouvement.

Inventée par le physiologiste Etienne-Jules Marey en 1882, la chronophotographie est un instrument d’observation scientifique. A l’aide d’une chambre photographique équipée d’un grand obturateur tournant, elle permet d’enregistrer une série d’images successives sur un même support photosensible (soit sur des plaques de verre de format 9 x 12 ou 13 x 18, soit, dès 1888, sur une bande mobile en celluloïd), à partir d’un point de vue unique et à des intervalles de temps égaux. Ces images, prises à une fraction de millième de seconde, restituent avec une troublante perfection l’intégralité du déplacement d’un sujet devant un fond noir. Dès lors, en visualisant de façon précise la décomposition et la variation des mouvements, il est possible d’en comprendre le fonctionnement. Georges Demenÿ, passionné de gymnastique, s’intéressant lui aussi à l’analyse de la locomotion humaine et à la façon dont on peut l’améliorer par la pratique d’exercices physiques, a été l’assistant de Marey à la Station physiologique du Parc des Princes entre 1881 et 1894. Lorsqu’en 1902 il est nommé professeur de physiologie à l’École normale de gymnastique et d’escrime de Joinville-le-Pont, il y installe à son tour un studio dans lequel il va prendre de nombreuses chronophotographies d’athlètes, notamment ces trois documents. Ces images d’une inépuisable richesse formelle constituent, avec d’autres, une véritable anthologie visuelle des techniques sportives accomplies en parfaite synthèse dans le temps et dans l’espace. Elles permettent l’étude de la force, de la vitesse, de l’adresse et de la souplesse des athlètes en action et ont conduit Demenÿ à donner une base scientifique à l’enseignement de l’éducation physique et à établir les fondements de ce qu’on appellera plus tard la biomécanique. Il faut signaler également les indéniables qualités plastiques de ces documents, qui présentent un intérêt exceptionnel au regard de l’histoire esthétique de la photographie. Les chronos géométriques ont du reste fortement impressionné certains artistes cubistes, tel Marcel Duchamp qui s’en inspira pour son “ Nu descendant un escalier ” en 1912.

Michel FRIZOT E.-J. Marey, la photographie du mouvement Paris, Centre Georges-Pompidou, 1977.

Laurent MANNONI Le Grand Art de la lumière et de l’ombre. Archéologie du cinéma Paris, Nathan Université, 1994.

Laurent MANNONI Georges Demenÿ, pionnier du cinéma Douai, Pagine Editions, 1997.

Laurent MANNONI Etienne-Jules Marey : la mémoire de l’œil Paris, Mazzotta-Cinémathèque Française, 1999.

Christian POCIELLO La Science en mouvements : Etienne Marey et Georges Demenÿ (1870-1920) Paris, PUF, 1999.

Pierre SIMONET L’INSEP, de la gymnastique joinvillaise aux sports contemporains Nancy, Gérard Klopp, 1998.

Christophe STUDENY L’Invention de la vitesse, France XVIIIe-XXe siècle Paris, Gallimard, coll.“ Bibliothèque des Histoires ”, 1996.

Chronophotographie : Analyse du mouvement, décomposé à l’aide de plusieurs photographies. C’est l’Américain Eadweard Muybridge qui invente ce procédé, repris et développé par le Français Jules Marey.

Laurent VÉRAY, « Le sport et la photographie scientifique », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 19/03/2024. URL : histoire-image.org/etudes/sport-photographie-scientifique

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