Aller au contenu principal
Palais de la Porte-Dorée. Vue de la façade

Palais de la Porte-Dorée. Vue de la façade

Date de création : 1931

Domaine : Architecture

© Établissement public du palais de la Porte-Dorée ; © ADAGP

http://www.histoire-immigration.fr

Le palais de la Porte-Dorée, témoignage de l’histoire coloniale

Date de publication : Avril 2008

Auteur : Claire MAINGON

Un palais permanent hérité de l’Exposition coloniale de 1931

Le palais de la Porte Dorée représente de seul vestige monumental de l’Exposition coloniale internationale de 1931, une manifestation destinée à montrer l’influence de l’Empire colonial français et européen. Après la rupture de la Grande Guerre, la France entendait soutenir et développer le rayonnement de son impérialisme, et voulait inciter les métropolitains à investir dans l’essor économique de ce que l’on nommait alors « la Plus Grande France ». Les maîtres d’œuvre de cette Exposition, dont le Maréchal Lyautey, avaient élu un site inhabituel pour une manifestation d’envergure semblable à une exposition universelle : le Bois de Vincennes, en bordure de l’ancienne porte de Picpus (aujourd’hui Porte Dorée). Ce choix dénotait la volonté des pouvoirs publics de dynamiser ce quartier encore très populaire, notamment en prolongeant la ligne n°8 du Métropolitain. La première pierre du Palais fut posée en 1928, sous le patronage de Gaston Doumergue, Président de la République française. Pendant l’Exposition, il prit le nom courant de Palais des colonies. Il abrita une section rétrospective, une section de synthèse et plusieurs réceptions officielles. Une haute statue du sculpteur Léon Drivier, représentant une minerve dorée et guerrière de sept mètres de haut, accueillait les visiteurs. Elle est aujourd’hui déplacée de quelques dizaines de mètres sur un terre-plein.

Une architecture éclectique et un décor grandiose

Classé au nombre des monuments historiques depuis 1987, le Palais de la Porte Dorée est un bâtiment unique dans le panorama de l’architecture parisienne. Témoin du goût conjugué des années trente pour l’exotisme et le rationalisme des formes, il est l’œuvre d’Albert Laprade et de Léon Jaussely. Ces deux architectes imposèrent dans la capitale un éclectisme en rupture avec la tradition néo-classique encore prônée par l’Ecole des Beaux-Arts. La façade du palais, scandée par de puissants piliers, est pourvue d’un somptueux décor de pierre très animé qui contraste avec l’architecture rectiligne du bâtiment. Confié au sculpteur Alfred-Auguste Janniot, le bas-relief se développe sous la forme d’une vaste fresque de 1130 mètres carrés. Ce tour de force artistique fut mené à terme en deux années seulement, à l’aide d’une bonne équipe de praticiens qui traduisirent dans la pierre les modèles en terre sculptés par Janniot. Rythmée par des allégories, la représentation de toute la faune et la flore exotique, cette parure de pierre exalte les richesses coloniales. L’intérieur du palais est également somptueusement décoré, avec de nombreuses mosaïques de sol et un immense décor de fresque réalisé par Ducos de la Haille dans la grande salle des fêtes. Certains Salons ont également reçu un choix de mobilier art déco dessiné par le célèbre ensemblier Ruhlmann.

Un bâtiment à vocation de propagande

L’architecture d’un bâtiment officiel est vouée à délivrer un message idéologique, symbolique ou commémoratif tout de suite identifiable. Les organisateurs de l’Exposition coloniale de 1931 souhaitaient faire montre de la puissance de la colonisation républicaine. Le Palais de la Porte Dorée, seul bâtiment à demeurer permanent à l’issue de la manifestation, devait donc satisfaire par son architecture et son décor à la délivrance de ces idéaux politiques du moment. Les deux architectes ont ainsi réalisé une synthèse architecturale des différents styles de l’empire colonial, en reprenant notamment le principe des palais marocains. Afin d’inscrire cette récupération dans l’héritage culturel occidental, ils y ont associé la monumentalité des temples antiques. La grande fresque de pierre qui recouvre la façade, exécutée magistralement par Alfred Auguste Janniot, délivre également un message à la fois pédagogique et propagandiste.

A l’instar d’un grand livre imagé représentant les colonies, le décor illustre les apports de l’Empire à la métropole. Les ethnies colonisées y sont minutieusement détaillées, et des inscriptions permettent d’identifier plus clairement les produits et les régions représentées. Par un jeu de réponse entre l’intérieur et l’extérieur, la fresque de Ducos de la Haille traite du thème de l’apport de la métropole à l’empire colonial. Le musée fut également pensé comme un mémorial de la colonisation, puisque l’on trouve gravée sur la façade latérale gauche du bâtiment une liste de personnalités scientifiques ou administratives qui se sont illustrées dans la conquête des colonies. Monument du colonialisme français, le Palais de la Porte Dorée servit à partir de 1960 d’écrin au Musée des Arts d’Afrique et d’Océanie (M.A.O.O.), dont les collections ont rejoint le Musée du Quai Branly ouvert en 2006. Depuis Octobre 2007, il abrite la Cité Nationale de l’Histoire et de l’Immigration.

Charles-Robert AGERON, « L’Exposition coloniale de 1931 : mythe républicain ou mythe impérial », dans Pierre NORA (dir.), Les lieux de mémoires, t. 1, La République, Paris, Gallimard, 1984, rééd. Quarto, 1997.

Maurice CULOT et Anne LAMBRICHS, Albert Laprade (1883-1978), Paris, éd. Norma, 2007.

Anne DEMEURISSE (dir.), Alfred-Auguste Janniot (1889-1969), Paris, éd. Somogy, 2003.

Catherine HODEIR et Michel PIERRE, L’Exposition coloniale de 1931, Bruxelles, Complexe, 1991.

Maureen MURPHY, Un palais pour une cité, du musée des Colonies à la Cité nationale de l’histoire de l’immigration, Paris, éd. RMN, 2007.

Germain VIATTE (dir.), Le palais des colonies, histoire du musée des Arts d’Afrique et d’Océanie, Paris, éd. RMN, 2002.

Claire MAINGON, « Le palais de la Porte-Dorée, témoignage de l’histoire coloniale », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 19/03/2024. URL : histoire-image.org/etudes/palais-porte-doree-temoignage-histoire-coloniale

Ajouter un commentaire

HTML restreint

  • Balises HTML autorisées : <a href hreflang> <em> <strong> <cite> <blockquote cite> <code> <ul type> <ol start type> <li> <dl> <dt> <dd> <h2 id> <h3 id> <h4 id> <h5 id> <h6 id>
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.
  • Les adresses de pages web et les adresses courriel se transforment en liens automatiquement.
CAPTCHA
Cette question sert à vérifier si vous êtes un visiteur humain ou non afin d'éviter les soumissions de pourriel (spam) automatisées.

Mentions d’information prioritaires RGPD

Vos données sont sont destinées à la RmnGP, qui en est le responsable de traitement. Elles sont recueillies pour traiter votre demande. Les données obligatoires vous sont signalées sur le formulaire par astérisque. L’accès aux données est strictement limité aux collaborateurs de la RmnGP en charge du traitement de votre demande. Conformément au Règlement européen n°2016/679/UE du 27 avril 2016 sur la protection des données personnelles et à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée, vous bénéficiez d’un droit d’accès, de rectification, d’effacement, de portabilité et de limitation du traitement des donnés vous concernant ainsi que du droit de communiquer des directives sur le sort de vos données après votre mort. Vous avez également la possibilité de vous opposer au traitement des données vous concernant. Vous pouvez, exercer vos droits en contactant notre Délégué à la protection des données (DPO) au moyen de notre formulaire en ligne ( https://www.grandpalais.fr/fr/form/rgpd) ou par e-mail à l’adresse suivante : dpo@rmngp.fr. Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter notre politique de protection des données disponible ici en copiant et en collant ce lien : https://www.grandpalais.fr/fr/politique-de-protection-des-donnees-caractere-personnel

Partager sur

Découvrez nos études

Les plans-reliefs

Les plans-reliefs

La collection des plans-reliefs

Née dans un contexte historique particulier, la collection des plans-reliefs doit son existence à une conception…

L'École centrale de Saint-Flour (1795-1802)

L'École centrale de Saint-Flour (1795-1802)

Créées par trois lois successives de 1795, les écoles centrales devaient dispenser un enseignement secondaire supérieur. Des professeurs rétribués…

L'École centrale de Saint-Flour (1795-1802)
L'École centrale de Saint-Flour (1795-1802)
L'École centrale de Saint-Flour (1795-1802)
L'École centrale de Saint-Flour (1795-1802)
Les pavillons éphémères de l'Exposition coloniale

Les pavillons éphémères de l'Exposition coloniale

Une visite à l’Exposition coloniale de 1931

Les divers documents réunis permettent de découvrir trois pavillons d’aspect monumental élevés à l’…

Les pavillons éphémères de l'Exposition coloniale
Les pavillons éphémères de l'Exposition coloniale
Les pavillons éphémères de l'Exposition coloniale
L'exposition de 1900 à travers des cartes publicitaires

L'exposition de 1900 à travers des cartes publicitaires

L'Exposition de 1900 est la cinquième Exposition universelle organisée à Paris. Inaugurée sous la présidence d'Emile Loubet, elle a permis à la…

L'exposition de 1900 à travers des cartes publicitaires
L'exposition de 1900 à travers des cartes publicitaires
L'exposition de 1900 à travers des cartes publicitaires
Un passé recréé : Pierrefonds

Un passé recréé : Pierrefonds

D’une forteresse à une folie architecturale

Construit à la fin du XIVe siècle pour Louis de Valois, frère de Charles VI, Pierrefonds…

Un passé recréé : Pierrefonds
Un passé recréé : Pierrefonds
Un passé recréé : Pierrefonds
L'architecture publicitaire du garage Marbeuf (Laprade & Bazin, 1928-1929)

L'architecture publicitaire du garage Marbeuf (Laprade & Bazin, 1928-1929)

L’ère de l’automobile

Dans les années 1920, si la construction automobile connaît un essor exceptionnel après la Première Guerre mondiale, l’…

L'architecture publicitaire du garage Marbeuf (Laprade & Bazin, 1928-1929)
L'architecture publicitaire du garage Marbeuf (Laprade & Bazin, 1928-1929)
L'architecture publicitaire du garage Marbeuf (Laprade & Bazin, 1928-1929)
L'architecture publicitaire du garage Marbeuf (Laprade & Bazin, 1928-1929)
Les galeries du Palais-Royal, ancêtre des passages couverts

Les galeries du Palais-Royal, ancêtre des passages couverts

Une spéculation immobilière

Le Palais-Royal devint la propriété des Orléans, branche cadette du royaume de France, en février 1692, quand Louis…

Le grand magasin, « temple de la Femme »

Le grand magasin, « temple de la Femme »

Au début du XIXe siècle, beaucoup de vêtements passent d’une classe à l’autre : la « marchande à la toilette » achète d’occasion des…

Le grand magasin, « temple de la Femme »
Le grand magasin, « temple de la Femme »
Les Halles de Paris à travers l'histoire

Les Halles de Paris à travers l'histoire

Origine des halles de Paris

Les origines des halles de Paris remontent à 1135, date à laquelle Louis VI le Gros décide de créer un marché sur le…

Les Halles de Paris à travers l'histoire
Les Halles de Paris à travers l'histoire
Visions de la Tour Eiffel

Visions de la Tour Eiffel

La tour Eiffel, symbole de Paris et de la France, paraît intemporelle. Mais l’unanimité que suscitent aujourd’hui ses 321 mètres donnent lieu ne…

Visions de la Tour Eiffel
Visions de la Tour Eiffel
Visions de la Tour Eiffel
Visions de la Tour Eiffel