Aller au contenu principal
Charlotte Corday à Caen en 1793.

Charlotte Corday à Caen en 1793.

Lieu de conservation : musée Bonnat (Bayonne)
site web

Date représentée : 1793

H. : 210 cm

L. : 125 cm

Huile sur toile.

Domaine : Peintures

© Photo RMN - Grand Palais - R. G. Ojeda

http://www.photo.rmn.fr

99-012295 / CM177

Charlotte Corday

Date de publication : Décembre 2008

Auteur : Charlotte DENOËL

Le conflit entre les Girondins et les Montagnards à la Convention

Créée le 20 septembre 1792 pour succéder à l’Assemblée législative, la Convention fut dominée dès ses débuts par les affrontements entre le parti de la Gironde et celui de la Montagne. Tout semblait opposer ces deux factions : les Girondins, issus de la bourgeoisie provinciale des grands ports côtiers et dirigés par Brissot, Vergniaud, Pétion et Roland, se montraient attachés au libéralisme économique et, affichant des positions modérées, étaient peu enclins à prendre des mesures d’exception pour sauver la république ; les Montagnards, au contraire, que l’on appelait ainsi parce qu’ils siégeaient sur les plus hauts bancs de l’assemblée, se distinguaient par leurs positions beaucoup plus radicales et hostiles à la monarchie. Dominés par Robespierre, Danton, Marat et Saint-Just et s’appuyant sur le peuple, ils défendaient les revendications égalitaires des sans-culottes et furent les premiers à réclamer l’instruction du procès du roi et la guerre sans relâche contre les ennemis de l’intérieur.

Charlotte Corday et l’assassinat de Marat

La première période de l’histoire de la Convention, du 21 septembre 1792 au 2 juin 1793, est marquée par cette rivalité entre Girondins et Montagnards. Si, à ses débuts, la Convention est majoritairement girondine, avec environ cent cinquante députés, les Montagnards connaissent leur apogée au printemps 1793, avec trois cents députés. La Gironde, très affaiblie par son manque d’unité lors du procès du roi et par les revers militaires (seconde invasion, soulèvement royaliste de la Vendée), poursuit sa lutte contre la Montagne en faisant arrêter l’un de ses principaux chefs de file, Jean-Paul Marat, le 13 avril 1793, mais ce dernier est bientôt acquitté et triomphalement reconduit à la Convention. Définitivement mise en minorité, la Gironde ne peut éviter l’insurrection qui secoue Paris du 31 mai au 2 juin et qui consacre sa chute. Décrétés en arrestation, certains députés réussissent cependant à quitter Paris pour Caen, où ils appellent au soulèvement de la province contre la Convention.

C’est ici qu’intervient le personnage de Charlotte Corday (1768-1793). Originaire du pays d’Auge, descendante de Pierre Corneille, Marie-Anne-Charlotte de Corday d’Armont est dans sa jeunesse pensionnaire de l’abbaye aux Dames de Caen, où elle reçoit une éducation soignée et lit les philosophes des Lumières comme Montesquieu ou Rousseau. La suppression des ordres religieux décrétée le 12 juillet 1790 par la loi sur la Constitution civile du clergé la contraint de retourner chez son père, loin de Caen. Mais, début juin 1791, elle revient vivre chez sa tante à Caen, où elle s’intéresse aux idées nouvelles, en particulier aux questions politiques et sociales. C’est ce que suggère ce portrait en pied qui la montre méditative, un livre ouvert à la main, le regard perdu dans le vague, et qu’a réalisé Tony Robert-Fleury, peintre académique du XIXe siècle spécialisé dans les compositions historiques et les portraits. En juin 1793, Charlotte Corday côtoie à Caen les milieux girondins en exil qui tiennent des assemblées pour appeler à l’insurrection fédéraliste contre la Convention. Le 9 juillet, elle quitte Caen pour Paris et, le 13, se rend au domicile de Marat, après lui avoir envoyé deux lettres. Le tenant pour le principal responsable de l’élimination de la Gironde, elle le poignarde dans son bain. Arrêtée immédiatement, Charlotte Corday est jugée par le Tribunal révolutionnaire et exécutée sur l’échafaud le 17 juillet, à vingt-cinq ans, entrant ainsi dans la légende des assassins célèbres de l’histoire.

L’élimination définitive de la Gironde

Comme bien d’autres femmes pendant la Révolution, Charlotte Corday souhaitait intervenir dans la vie politique, par sa présence aux séances des Girondins et par son acte qui était destiné à mettre fin à la guerre civile qui ravageait la France : « J’ai tué un homme pour en sauver cent mille », déclara-t-elle à ses juges. L’assassinat de l’« Ami du peuple » qu’était Marat la fit passer pour un monstre fanatique aux yeux des révolutionnaires, qui refusaient d’accorder aux femmes une place dans l’espace politique, craignant des débordements de violence. Du reste, malgré son geste, Charlotte Corday ne put sauver les Girondins : la rébellion des provinces fédéralistes fut sévèrement réprimée par la Convention, qui fit pourchasser et arrêter les Girondins hors la loi. Ceux-ci, parmi lesquels figuraient Brissot et Vergniaud, furent jugés le 30 octobre 1793 par le Tribunal révolutionnaire et guillotinés le lendemain. Ceux qui échappèrent aux arrestations vécurent dans la clandestinité jusqu’à ce qu’ils soient finalement rappelés à la Convention par les décrets des 18 frimaire et 18 ventôse an III (8 décembre 1794 et 8 mars 1795). Cette élimination de leurs principaux adversaires permit aux Montagnards d’instaurer au nom du « salut public » et de la « sûreté générale » une politique répressive plus radicale, fondée sur la Terreur et le dirigisme économique, afin de faire face aux dangers qui menaçaient la République à l’intérieur et à l’extérieur de ses frontières.

Jean-Denis BREDIN, « On ne meurt qu’une fois » Charlotte Corday, Paris, Fayard, 2006.Marie-Paule DUHET, Les Femmes et la Révolution, 1789-1794, Paris, Gallimard, coll. « Archives », 1979.Dominique GODINEAU, Citoyennes tricoteuses. Les femmes du peuple à Paris pendant la Révolution française, Aix-en-Provence, Alinéa, 1988, 2e éd., Paris, Perrin, 2003.Bernardine MELCHIOR-BONNET, Charlotte Corday, Paris, Perrin, 1972, rééd.2000.Jean-René SURATTEAU et François GENDRON, Dictionnaire historique de la Révolution française, Paris, P.U.F., 1989.Jean TULARD, Jean-François FAYARD et Alfred FIERRO, Histoire et dictionnaire de la Révolution française, Paris, Laffont, 1987.

Charlotte DENOËL, « Charlotte Corday », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 18/04/2024. URL : histoire-image.org/etudes/charlotte-corday

Anonyme (non vérifié)

Bonsoir.
Dans votre bibliographie - excellente au demeurant - vous avez oublié un ouvrage de grande qualité sur Charlotte Corday, que j'ai, pour ma part, lu et relu à plusieurs reprises :
"Charlotte Corday ou l'ange de la colère", de France Huser, collection "Elle était une fois", édité par Robert Laffont, 1993.
Cordialement.

ven 13/01/2012 - 21:41 Permalien
Anonyme (non vérifié)

Bonjour.
Autre ajout bibliographique, l'excellent livre de Guillaume Mazeau: Le Bain de l'histoire, sous-titré Charlotte Corday et l'attentat contre Marat 1793-2009 (éd. Champ Vallon, 2009).

sam 27/12/2014 - 10:52 Permalien
Anonyme (non vérifié)

Charlotte CORDAY s'est rendue 2 fois chez MARAT: le matin à 9h où elle n'a pas été reçue et le soir vers 19 h où elle a commis son assassinat .Mais les personnes présentes , uniquement des femmes ( sa soeur, sa " femme" et une servante) n'ont pris aucune précaution et n'ont pas demandé le motif de sa visite .
On ne comprend pas bien pourquoi Marat reçoit en étant dans son bain.

dim 15/02/2015 - 20:47 Permalien
Anonyme (non vérifié)

Marat avait une affection dermatologique très pénible et était obligé de "tremper" dans son bain, auquel était ajouté un produit soufré, de longues heures de la journée.
Voilà pourquoi il recevait dans son bain.

ven 10/04/2015 - 12:31 Permalien

Ajouter un commentaire

HTML restreint

  • Balises HTML autorisées : <a href hreflang> <em> <strong> <cite> <blockquote cite> <code> <ul type> <ol start type> <li> <dl> <dt> <dd> <h2 id> <h3 id> <h4 id> <h5 id> <h6 id>
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.
  • Les adresses de pages web et les adresses courriel se transforment en liens automatiquement.
CAPTCHA
Cette question sert à vérifier si vous êtes un visiteur humain ou non afin d'éviter les soumissions de pourriel (spam) automatisées.

Mentions d’information prioritaires RGPD

Vos données sont sont destinées à la RmnGP, qui en est le responsable de traitement. Elles sont recueillies pour traiter votre demande. Les données obligatoires vous sont signalées sur le formulaire par astérisque. L’accès aux données est strictement limité aux collaborateurs de la RmnGP en charge du traitement de votre demande. Conformément au Règlement européen n°2016/679/UE du 27 avril 2016 sur la protection des données personnelles et à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée, vous bénéficiez d’un droit d’accès, de rectification, d’effacement, de portabilité et de limitation du traitement des donnés vous concernant ainsi que du droit de communiquer des directives sur le sort de vos données après votre mort. Vous avez également la possibilité de vous opposer au traitement des données vous concernant. Vous pouvez, exercer vos droits en contactant notre Délégué à la protection des données (DPO) au moyen de notre formulaire en ligne ( https://www.grandpalais.fr/fr/form/rgpd) ou par e-mail à l’adresse suivante : dpo@rmngp.fr. Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter notre politique de protection des données disponible ici en copiant et en collant ce lien : https://www.grandpalais.fr/fr/politique-de-protection-des-donnees-caractere-personnel

Partager sur

Découvrez nos études

Franz Liszt, de la gloire aux ténèbres

Franz Liszt, de la gloire aux ténèbres

Prodige et renoncement

Pianiste hors norme et compositeur novateur, Franz Liszt (1811-1886) est l’un des plus grands musiciens du XIXe…

Franz Liszt, de la gloire aux ténèbres
Franz Liszt, de la gloire aux ténèbres
Franz Liszt, de la gloire aux ténèbres
Une femme force les portes de l’Académie

Une femme force les portes de l’Académie

L'Académie royale de peinture et de sculpture est fondée sur mandat royal en 1648. Elle constitue l'un des socles institutionnels sur lesquels…

Femmes à l'usine

Femmes à l'usine

Dans le second XIXe siècle, avec la généralisation des machines qui exécutent elles-mêmes les travaux de force, le travail féminin s'…

Femmes à l'usine
Femmes à l'usine
La Belle Otero, emblème de la Belle Époque

La Belle Otero, emblème de la Belle Époque

Le soleil d’Espagne dans les théâtres parisiens

La fièvre de l’exotisme parcourt l’Europe pendant tout le XIXe siècle, influençant la littérature…

La Belle Otero, emblème de la Belle Époque
La Belle Otero, emblème de la Belle Époque
La Belle Otero, emblème de la Belle Époque
La Belle Otero, emblème de la Belle Époque
Les Gaulois vus par Fernand Cormon

Les Gaulois vus par Fernand Cormon

Les Gaulois, ces inconnus

Qui sont les Gaulois ? La question intrigue les savants, les dirigeants et – dans une moindre mesure – la population…

Les Gaulois vus par Fernand Cormon
Les Gaulois vus par Fernand Cormon
Les Gaulois vus par Fernand Cormon
Charlotte Corday

Charlotte Corday

Le conflit entre les Girondins et les Montagnards à la Convention

Créée le 20 septembre 1792 pour succéder à l’Assemblée législative, la…

L’évolution de la bicyclette

L’évolution de la bicyclette

Un premier regard rétrospectif

La série d’estampes L’évolution de la bicyclette a été exécutée par Maurice Neumont (1868-1930) en 1896. À cette…

L’évolution de la bicyclette
L’évolution de la bicyclette
L’évolution de la bicyclette
L’évolution de la bicyclette
La représentation d'une société coloniale complexe

La représentation d'une société coloniale complexe

Un peintre rémois aux Antilles

Rares sont les exemples aux Antilles d’œuvres peintes aussi anciennes que ce pastel représentant Quatre femmes…

La journée d’une grisette

La journée d’une grisette

Fugace comme un oiseau

Dans le contexte d’industrialisation et d’urbanisation massives qui se développent en France dès la première moitié du XIX…

La journée d’une grisette
La journée d’une grisette
La grève au Creusot (1899)

La grève au Creusot (1899)

Au XIXe siècle, les usines Schneider au Creusot sont les plus grandes de France. Pendant trente ans – de 1871 à 1899 –, la paix sociale…