Aller au contenu principal
L'Esclave blanche

L'Esclave blanche

Les Soupirants

Les Soupirants

Farniente

Farniente

Le Thé

Le Thé

L'Esclave blanche

L'Esclave blanche

Date de création : 1888

Date représentée :

H. : 146 cm

L. : 118 cm

Huile sur toile.

Domaine : Peintures

© Photo RMN - Grand Palais - G. Blot

http://www.photo.rmn.fr

99-020173 / INV1063

Le nu enfumé

Date de publication : Octobre 2011

Auteur : Didier NOURRISSON

Le nouveau Nu

Avec la IIIe République, les mœurs se libéralisent et la censure se relâche. Sans doute, le grand dessin du nu académique, à l’exécution soignée et toujours figurative, demeure, mais les références obligée aux scènes de la mythologie ou les transports émotionnels dans des harems de pacotille s’estompent. L’intimité féminine se dévoile en des lieux familiers, cabinet de toilette, salle de bain, et sur des meubles confortables (divans). Un élément vient souvent donner une note d’actualité : la cigarette.

L’association de la femme et de la cigarette date de Mérimée avec sa Carmen. Mais au temps de la monarchie de Juillet, la fume au féminin faisait scandale et dénonçait la « lionne », une femme qui cherchait à s’émanciper. George Sand, qui introduit le mot « cigarette » dans la littérature, en est la figure emblématique. Sous la IIIe République débutante, la cigarette se banalise : on compte 100 millions de cigarettes vendues en 1872, 3 milliards en 1909. Les femmes, dans leur espace privé, commencent à s’adonner couramment à cette pratique nouvelle. L’essence du savoir-vivre est simplement de ne pas fumer dans la rue et en société.

La fumeuse nue

Jean Jules Antoine Lecomte du Nouy (1842-1923) reprend l’idée de la scène de harem et de la traite des Blanches avec son Esclave blanche (l’année de l’abolition de l’esclavage au Brésil). La facture est furieusement romantique : au bord du bassin, sous le regard de deux eunuques, assise sur ses parures de soie, à côté de coussins, tapis et vaisselle d’art, une femme nue se perd dans des rêveries. La modernité vient de la cigarette qu’elle tient nonchalamment dans la main gauche. Elle souffle un filet de fumée qui donne mystère et saveur à l’espace. Le tabac est sans doute au « goût levantin » ; les marques de cigarettes de ce type se comptaient par dizaines dans les années 1880.

La peinture de Paul Albert Laurens (1870-1934) intitulée Les Soupirants fait tourner un Arlequin et un Pierrot de comédie autour d’une belle Orientale lascivement étendue sur un sofa : le mythe de la Circassienne bat toujours son plein en faisant battre les cœurs.

Le Farniente d’Ernest Philippe Zacharie (1849-1915) montre la plastique d’un corps lisse et glabre d’une femme qui vient de se lever après la sieste et s’étire nonchalamment.

Jules Scalbert (1851-1928) donne une version très érotique de la pause thé : une soubrette impeccablement vêtue apporte le plateau (avec deux tasses : l’homme n’est pas loin ?) à sa maîtresse nue sous un déshabillé qui ne cache rien de ses formes. Là encore, la scène se situe dans un intérieur bourgeois (canapé Louis XV à la Pompadour).

Dans les trois cas, la cigarette souligne la beauté de la femme par l’élégance du geste. À remarquer le fume-cigarette de l’Orientale qui, avec le long collier de perles à double rang, annonce la mode des années folles.

Bientôt la cigarette fait femme

Dans les années 1910, la publicité pour les cigarettes n’ose encore guère utiliser l’image de la femme. Il faudra attendre les années 1920 pour voir à l’affiche de belles fumeuses chargées d’entraîner les hommes à la fume. La Gitane en est un bel exemple : d’abord dessinée, elle est photographiée dans les années 1930 sous les traits d’une danseuse de flamenco, toujours habillée cependant. En revanche, la peinture donne déjà à voir des femmes, de préférence nues, avec une cigarette langoureuse, dans une scène intime en principe naturaliste.

Jacqueline BALTRAN, Paris, carrefour des arts et des lettres. 1880-1918, Paris, L’Harmattan, 2002.

Kenneth CLARK, Le Nu, Paris, Le Livre de Poche, coll. « Art », 1969, rééd. Hachette coll. « Pluriel », 1998.

William A.EWING, Le Siècle du corps, Paris, éditions de La Martinière, 2000.

Michel HADDAD, La Divine et l’impure. Le nu au XIXe siècle, Paris, Éditions du Jaguar, 1990.

Didier NOURRISSON, Cigarette. Histoire d’une allumeuse, Paris, Payot, 2010.

Didier NOURRISSON, « Le nu enfumé », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 28/03/2024. URL : histoire-image.org/etudes/nu-enfume

Albertine (non vérifié)

Bonjour,

Deux petites observations :

d'abord, concernant l'interprétation de l'image : il ne s'agit pas de deux eunuques compte-tenu de la généreuse poitrine de la femme noire que l'on aperçoit de profil, trois-quart dos... si ?

Ensuite, vous dites que la publicité ne s'empare pas de la figure de la femme pour promouvoir la cigarette avant les années 20, mais sauf erreur, les artistes de l'art nouveau comme Mucha ou Atche le font dès les années 1880. Ces exemples ne comptent-ils pas ?

ven 10/11/2023 - 16:16 Permalien

Ajouter un commentaire

HTML restreint

  • Balises HTML autorisées : <a href hreflang> <em> <strong> <cite> <blockquote cite> <code> <ul type> <ol start type> <li> <dl> <dt> <dd> <h2 id> <h3 id> <h4 id> <h5 id> <h6 id>
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.
  • Les adresses de pages web et les adresses courriel se transforment en liens automatiquement.
CAPTCHA
Cette question sert à vérifier si vous êtes un visiteur humain ou non afin d'éviter les soumissions de pourriel (spam) automatisées.

Mentions d’information prioritaires RGPD

Vos données sont sont destinées à la RmnGP, qui en est le responsable de traitement. Elles sont recueillies pour traiter votre demande. Les données obligatoires vous sont signalées sur le formulaire par astérisque. L’accès aux données est strictement limité aux collaborateurs de la RmnGP en charge du traitement de votre demande. Conformément au Règlement européen n°2016/679/UE du 27 avril 2016 sur la protection des données personnelles et à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée, vous bénéficiez d’un droit d’accès, de rectification, d’effacement, de portabilité et de limitation du traitement des donnés vous concernant ainsi que du droit de communiquer des directives sur le sort de vos données après votre mort. Vous avez également la possibilité de vous opposer au traitement des données vous concernant. Vous pouvez, exercer vos droits en contactant notre Délégué à la protection des données (DPO) au moyen de notre formulaire en ligne ( https://www.grandpalais.fr/fr/form/rgpd) ou par e-mail à l’adresse suivante : dpo@rmngp.fr. Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter notre politique de protection des données disponible ici en copiant et en collant ce lien : https://www.grandpalais.fr/fr/politique-de-protection-des-donnees-caractere-personnel

Partager sur

Découvrez nos études

Femmes et frissons de plaisir à la Belle Époque

Femmes et frissons de plaisir à la Belle Époque

La République s’amuse

Après le régime si décrié du Second Empire (« la fête impériale »), la IIIe République a commencé par un retour…

Femmes et frissons de plaisir à la Belle Époque
Femmes et frissons de plaisir à la Belle Époque
Femmes et frissons de plaisir à la Belle Époque
Femmes et frissons de plaisir à la Belle Époque
Les victimes civiles de la guerre de 1914-1918

Les victimes civiles de la guerre de 1914-1918

Le viol des femmes françaises par les soldats allemands semble avoir été, dès les premières semaines de la guerre de 1914-1918, un acte très…

La duchesse de Longueville

La duchesse de Longueville

Un portrait conventionnel

Ce portrait est attribué à l’atelier de Charles et Henri Beaubrun, qui s’illustrèrent dans l’art du portrait de cour sous…

Madame Roland et l'engagement politique des femmes sous la Révolution

Madame Roland et l'engagement politique des femmes sous la Révolution

Les salons féminins au XVIIIe siècle

Nés au XVIIe siècle, les salons particuliers tenus par des femmes se multiplient au siècle…

Autoportrait de Marie-Adélaïde Durieux

Autoportrait de Marie-Adélaïde Durieux

Un autoportrait parmi d’autres

On sait peu de chose de Marie-Adelaïde Durieux, sinon qu’elle a exposé aux Salons de 1793 à 1798 et qu’elle est…

Le féminisme réformiste en France

Le féminisme réformiste en France

Le combat des femmes françaises pour l’égalité

Depuis le dernier tiers du XIXe siècle, les féministes françaises revendiquent l’…

Le féminisme réformiste en France
Le féminisme réformiste en France
Le féminisme réformiste en France
Berlin dans les années 30 : entre frénésie et chaos

Berlin dans les années 30 : entre frénésie et chaos

L’Allemagne en plein chaos

La Première Guerre mondiale et la défaite allemande ont eu d’importantes conséquences politiques et économiques. D’une…

L'aide américaine en Picardie

L'aide américaine en Picardie

Lorsque la Première Guerre mondiale éclate en Europe, de nombreux volontaires américains traversent l’Atlantique pour venir en aide aux alliés…
L'aide américaine en Picardie
L'aide américaine en Picardie
L'aide américaine en Picardie
Fauvisme : l'intérêt pour les arts premiers et la culture populaire

Fauvisme : l'intérêt pour les arts premiers et la culture populaire

Les conditions de l’ouverture aux autres cultures

L’intérêt pour les arts premiers, notamment africains et océaniens, se comprend dans le…

Fauvisme : l'intérêt pour les arts premiers et la culture populaire
Fauvisme : l'intérêt pour les arts premiers et la culture populaire
Marie Vassilieff, une figure de Montparnasse

Marie Vassilieff, une figure de Montparnasse

Marie Vassilieff et l’École de Paris

Née en 1884, Marie Vassilieff étudie la médecine et l’art à Saint-Pétersbourg. Grâce à une bourse de voyage…