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Pèlerinage à l'île de Cythère

Pèlerinage à l'île de Cythère

Lieu de conservation : musée du Louvre (Paris)
site web

Date de création : 1717

Date représentée :

H. : 129 cm

L. : 194 cm

Autre titre : L'Embarquement pour Cythère.

Huile sur toile.

Domaine : Peintures

© GrandPalaisRmn (musée du Louvre) / Stéphane Maréchalle

Lien vers l'image

INV 8525, MR 2726 - 11-550799

Pèlerinage à l’île de Cythère, dit l’Embarquement pour Cythère

Date de publication : mai 2013

Auteur : Pierre-Yves BEAUREPAIRE

Les années Régence

Watteau incarne « le printemps du siècle » (Michelet) et la période d’ouverture des années Régence, qui tranche avec l’austérité que Louis XIV (1661-1715) a fait peser sur la fin de son règne. Sous la régence du duc Philippe d’Orléans (1715-1723), alors que Louis XV né en 1710, débute son apprentissage du dur métier de roi, la France panse ses plaies. La paix succède à des décennies de conflits en Europe. Paris et Londres cherchent l’apaisement et concluront bientôt une improbable alliance. Avec le Régent, le centre du pouvoir quitte Versailles pour Paris. La rigueur dévote du Grand Roi laisse place à un temps de respiration et de libération des mœurs dont les sociétés aristocratiques profitent pour donner des fêtes brillantes et libertines, que Watteau excelle à peindre.

Un pèlerinage amoureux

Le sujet de l’œuvre d’Antoine Watteau a longtemps fait débat. On se demande en effet si les couples amoureux embarquent pour l’île de Cythère ou s’ils en reviennent. Le peintre s’est probablement inspiré d’une comédie à la mode, Les Trois Cousines, de Dancourt, écrite en 1702, qui se termine par la chanson suivante : « Venez à l’île de Cythère / En pèlerinage avec nous / Jeune fille n’en revient guère / Ou sans amant ou sans époux. »

Le bâton que tiennent les hommes rappelle, de fait, celui des pèlerins. Dans la mythologie, l’île grecque de Cythère est associée à la déesse Aphrodite qui l’aborde peu après sa naissance. Une statue de Vénus, son équivalent dans le panthéon romain, est visible à droite. Les fleurs qui l’enveloppent sont une évocation des tendres nœuds de l’amour. Contre son socle, un carquois garni de flèches évoque les traits de l’Amour. Bien visible à la poupe de la barque, la coquille renvoie à la fois au pèlerinage et à la naissance de Vénus. Un vol de petits Cupidon ailés entoure la barque de l’Amour et guide les pèlerins. La sensualité de la scène ne fait aucun doute.

Watteau, « maître des sérénités douces et des paradis tendres » (Jules et Edmond de Goncourt)

Cette œuvre a été réalisée dans un contexte institutionnel particulier puisqu’il s’agit de la pièce de réception de l’artiste à l’Académie royale de peinture et sculpture. Par opposition à un genre plus classique comme la peinture d’histoire, son caractère inédit a incité les académiciens à créer celui de la « fête galante », spécifiquement pour Watteau. D’ailleurs, lors de son enregistrement par l’Académie, le titre de l’œuvre, Pèlerinage à l’isle de Cythère, a été biffé et remplacé par Une fête galante. Par la suite, le tableau de Watteau sera désigné comme L’Embarquement pour Cythère jusqu’en 1961.

Si, dans son Dictionnaire, Furetière définit la fête galante comme « une réjouissance d’honnêtes gens », il n’empêche que ces pèlerins de l’amour venus rendre hommage à Aphrodite/Vénus évoquent surtout l’insouciance et la douceur de vivre des années Régence pour les élites aristocratiques et mondaines enfin libérées de l’austérité et de la rigueur morale de la fin du règne de Louis XIV. Les codes de la vie de société sont ici respectés : les jeux de séduction n’empêchent pas la maîtrise de la sensualité et le contrôle de soi. Mais la légèreté du sujet ne fait pas de doute. Watteau remporte un succès remarquable auprès de ce public choisi, au point de retarder la réalisation de cette œuvre de réception académique pour répondre à de nombreuses commandes particulières. Dans L’Art du XVIIIe siècle. Watteau (1860), les Goncourt ne tarissent pas d’éloges sur le chef-d’œuvre de celui qu’ils nomment « le grand poète du XVIIIe siècle ».

Pour en savoir plus sur le nouveau genre pictural des "fêtes galantes", allez sur le site Panorama de l'art

Pierre-Yves BEAUREPAIRE, La France des Lumières 1715-1789, Paris, Belin, Histoire de France, 2011.

François MOUREAU et Margaret MORGAN GRASSELLI (dir.), Antoine Watteau (1684-1721) : le peintre, son temps et sa légende, colloque international, Paris, Grand Palais, 1984, Paris-Genève, Champion-Slatkine, 1987. 

Académie : L’Institut de France est créé par la loi du 25 octobre 1795 sur l’organisation de l’instruction publique. Au sein du palais de l’Institut de France, travaillent cinq académies : l’Académie française (fondée en 1635), l’Académie des inscriptions et belles-lettres (fondée en 1663), l’Académie des sciences (fondée en 1666), l’Académie des beaux-arts (créée en 1816 par la réunion de l’Académie royale de peinture et de sculpture, fondée en 1648, de l’Académie de musique, fondée en 1669, et de l’Académie d’architecture, fondée en 1671) et l’Académie des sciences morales et politiques (fondée en 1795, supprimée en 1803 et rétablie en 1832). (Source : https://www.institutdefrance.fr/les-cinq-academies/.)

Pierre-Yves BEAUREPAIRE, « Pèlerinage à l’île de Cythère, dit l’Embarquement pour Cythère », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 19/04/2024. URL : histoire-image.org/etudes/pelerinage-ile-cythere-dit-embarquement-cythere

Découvrez l'étude du Pèlerinage sur l'île de Cythère sur le site de Panorama de l'art

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