Aller au contenu principal
Napoléon reçoit les clefs de Vienne à Schönbrunn, le 13 novembre 1805.

Napoléon reçoit les clefs de Vienne à Schönbrunn, le 13 novembre 1805.

Napoléon devant Madrid, 3 décembre 1808.

Napoléon devant Madrid, 3 décembre 1808.

Napoléon reçoit les clefs de Vienne à Schönbrunn, le 13 novembre 1805.

Napoléon reçoit les clefs de Vienne à Schönbrunn, le 13 novembre 1805.

Date de création : 1808

Date représentée : 13 novembre 1805

H. : 380

L. : 532

Huile sur toile Commandé pour la galerie de Diane aux Tuileries en 1806 ; Salon de 1808, n° 257 Placé en 1808 et retiré en 1810 pour être envoyé aux Gobelins (fragment tissé au musée de Malmaison) ; réserves du Louvre ; entré à Versailles en 1835

Domaine : Peintures

© Photo RMN - Grand Palais

http://www.photo.rmn.fr

89EE846 / MV.1549

Les redditions

Date de publication : Octobre 2005

Auteur : Jérémie BENOÎT

Général invaincu depuis Toulon malgré quelques victoires douteuses comme Marengo, Napoléon grâce à ses talents militaires fut en mesure d’écraser les armées ennemies par d’habiles manœuvres d’encerclement. Les portes de nombreuses capitales étrangères lui furent ainsi ouvertes

: Milan, Venise, Le Caire, puis Vienne, Berlin, Madrid et Moscou, qui fut son tombeau. Ces victoires militaires lui ont permis de conquérir et de conforter une légitimité politique devenue inséparable des armes.
Toutes ces villes ne tombèrent cependant pas facilement. Aux offensives grisantes du début de l’Empire, où la France a pu faire figure de libérateur, succèdent en effet des guerres n’ayant eu d’autre but que d’étendre la domination française. En Espagne en particulier, la population se souleva en 1808 contre l’occupant français, comme au Caire auparavant. Ces deux œuvres témoignent à leur manière de cette évolution.

Le tableau de Girodet

Grand peintre, très indépendant et d’un caractère taciturne, Girodet, élève de David, était mal à l’aise avec les commandes officielles. D’autant que, demeuré démocrate, il ne croyait guère en Napoléon à l’instar de son maître. Ce dont fait foi son célèbre tableau des Héros français accueillis dans le paradis d’Ossian (1800-1802, musée de Malmaison), rappel des compagnons d’armes de Bonaparte morts durant les guerres de la Révolution, et qui laissèrent ainsi le champ libre au Premier consul pour faire son coup d’Etat.

Ce malaise vis-à-vis de la peinture officielle se lit parfaitement dans ce tableau, qui fit partie d’une commande destinée à commémorer la campagne de 1805. L’œuvre se réduit à un simple face-à-face entre Napoléon et les dignitaires viennois qui, conduits par le prince de Seidenstetten et le comte Veterani, sont venus lui donner les clefs de la ville. A l’arrière-plan, on aperçoit la Gloriette et l’entrée du palais de Schönbrunn.
Après avoir fait prisonnière l’armée autrichienne à Ulm en octobre 1805 et repoussé les Russes en attendant la bataille d’Austerlitz le 2 décembre, Napoléon avança vers Vienne, déclarée ville ouverte. Le 14 novembre il pénétra dans la capitale de l’empire d’Autriche.
Sur ce tableau, les dignitaires ecclésiastiques, les militaires de la place de Vienne conduits par le général Bourgeois, et les officiers municipaux, dont le bourgmestre von Wohleben, présentent les clefs de la ville à Napoléon qu’entourent Murat, Bessières et Berthier, maréchaux le plus souvent représentés dans les peintures. Dans le fond apparaît cependant aussi le mamelouk Roustan, à côté du cheval de Napoléon. A l’humilité ou à la résignation des Autrichiens s’opposent les attitudes assurées et provocantes des Français.

Le tableau de Vernet

Les expressions relevées dans le tableau de Girodet sont plus exacerbées encore dans le tableau de Vernet. C’est aussi que le contexte politique était différent entre les Viennois ayant accepté la capitulation en raison de la défaite de leur armée, et la dure répression menée par Murat qui suivit l’insurrection du « Dos de Mayo » (2 mai 1808), si bien illustrée dans deux peintures de Goya (musée du Prado). L’Espagne entière s’étant soulevée et ses généraux ne parvenant pas à pacifier le pays (Dupont capitula à Baylen le 22 juin 1808), Napoléon se décida à mener une campagne qui lui permit d’entrer à Madrid le 4 décembre 1808. Entouré de Berthier et de généraux, Napoléon accuse d’un doigt indigné les généraux Morla et Fernando de la Vera, militaires de la place de Madrid, et les chefs des troupes populaires madrilènes, rendus responsables du soulèvement. Dans le tableau de Vernet, les attitudes de soumission des Espagnols sont outrancières – comme le fut cette guerre terrible –, mais c’est pour mieux accuser la propagande visant à grandir la puissance de Napoléon. Car c’est autour de la main de l’Empereur que tourne toute la composition. De cette « main de justice » dépend le sort des généraux espagnols.

Comparée au tableau de Girodet, l’œuvre de Vernet est beaucoup plus forte. Mais il est vrai que les Autrichiens, loyaux envers leur armée et n’ayant pas assisté à la déposition de leur souverain comme ce fut le cas en Espagne, ne s’étaient pas soulevés. L’insurrection des Tyroliens d’Andreas Höfer surviendra en 1809. De ce fait, à la composition calme de Girodet, toute de soumission retenue envers un souverain victorieux, s’oppose une composition dramatique, où Vernet multiplie les têtes d’expression de la tradition picturale classique, allant de la haine et de la rigidité à l’effroi qui se lisent sur les visages des Espagnols. Napoléon est certes entré dans Madrid, mais rien n’est perdu, car c’est le peuple en armes qui s’est insurgé contre l’occupant français. Le tableau de Vernet avait été exposé en 1810, deux ans après l’événement. Or la guérilla d’usure se poursuivait en Espagne. Le peintre avait exprimé des sentiments espagnols qui traduisaient l’irréductibilité de la lutte et sonnent comme une sorte de prémonition à l’issue de cette guerre farouche.

Yveline CANTAREL-BESSON, Claire CONSTANS et Bruno FOUCART Napoléon. Images et histoire : peintures du château de Versailles (1789-1815) Paris, RMN, 2001.Jean-René AYMES « Comment la guérilla espagnole a chassé Napoléon » in L’Histoire n° 75, février 1985.Roger DUFRAISSE et Michel KERAUTRET La France napoléonienne. Aspects extérieurs Paris, Seuil, coll. « Points Histoire », 1999.Alain PIGEARD L’Armée de Napoléon, organisation et vie quotidienne, Paris, Tallandier, 2000.Gunther E. ROTHENBERG Atlas des guerres napoléoniennes : 1796-1815 Paris, Autrement, 2000.Jean TULARD (sous la direction de), Dictionnaire Napoléon Paris, Fayard, 1987, rééd.1999.Jean TULARD (sous la direction de) L’Histoire de Napoléon par la peinture Paris, Belfond, 1991.Catalogue de l’exposition Dominique Vivant Denon. L’œil de Napoléon Paris, Louvre, 1999.

Jérémie BENOÎT, « Les redditions », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 28/03/2024. URL : histoire-image.org/etudes/redditions

Ajouter un commentaire

HTML restreint

  • Balises HTML autorisées : <a href hreflang> <em> <strong> <cite> <blockquote cite> <code> <ul type> <ol start type> <li> <dl> <dt> <dd> <h2 id> <h3 id> <h4 id> <h5 id> <h6 id>
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.
  • Les adresses de pages web et les adresses courriel se transforment en liens automatiquement.
CAPTCHA
Cette question sert à vérifier si vous êtes un visiteur humain ou non afin d'éviter les soumissions de pourriel (spam) automatisées.

Mentions d’information prioritaires RGPD

Vos données sont sont destinées à la RmnGP, qui en est le responsable de traitement. Elles sont recueillies pour traiter votre demande. Les données obligatoires vous sont signalées sur le formulaire par astérisque. L’accès aux données est strictement limité aux collaborateurs de la RmnGP en charge du traitement de votre demande. Conformément au Règlement européen n°2016/679/UE du 27 avril 2016 sur la protection des données personnelles et à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée, vous bénéficiez d’un droit d’accès, de rectification, d’effacement, de portabilité et de limitation du traitement des donnés vous concernant ainsi que du droit de communiquer des directives sur le sort de vos données après votre mort. Vous avez également la possibilité de vous opposer au traitement des données vous concernant. Vous pouvez, exercer vos droits en contactant notre Délégué à la protection des données (DPO) au moyen de notre formulaire en ligne ( https://www.grandpalais.fr/fr/form/rgpd) ou par e-mail à l’adresse suivante : dpo@rmngp.fr. Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter notre politique de protection des données disponible ici en copiant et en collant ce lien : https://www.grandpalais.fr/fr/politique-de-protection-des-donnees-caractere-personnel

Partager sur

Découvrez nos études

Le siège de Saragosse

Le siège de Saragosse

Depuis 1808, l’Espagne était livrée à une guerre complexe et cruelle entre les occupants français et les révoltés animés d’un fort sentiment…

Portrait du duc de Villars

Portrait du duc de Villars

Le duc de Villars, maréchal de France

Ce tableau est regardé comme la copie, une dizaine d’années plus tard, d’un premier portrait réalisé en 1704…

L’assassinat de Concini

L’assassinat de Concini

Dire l’événement en vignettes

Le 24 avril 1617, Concini, maréchal d’Ancre, est assassiné à l’entrée du Louvre par des fidèles serviteurs du jeune…

La bataille de Somo-Sierra (30 novembre 1808)

La bataille de Somo-Sierra (30 novembre 1808)

Les difficultés internes de l’Espagne et les nécessités du maintien du blocus continental établi par décret à Berlin le 21 novembre 1806…

L’immigration des travailleurs en France

L’immigration des travailleurs en France

L’immigration des travailleurs en France de 1850 à 1914

Marie-Paul Lancrenon (1857-1922), militaire de carrière, profite de ses missions pour…

Les Grandes Eaux illuminées au bassin de Neptune en l'honneur du Roi d'Espagne

Les Grandes Eaux illuminées au bassin de Neptune en l'honneur du Roi d'Espagne

Au cours du Second Empire, la France souhaite développer sa présence commerciale en Europe en exploitant notamment le chemin de fer afin de tisser…

Le traité des Pyrénées

Le traité des Pyrénées

Après un séjour de quatre ans à Rome, Charles Le Brun arrive à Paris en mars 1646. Avec l’appui du chancelier Séguier, il obtient plusieurs…

Le traité de Nimègue

Le traité de Nimègue

Célébrer la paix

Le tableau anonyme et allégorique de la paix de Nimègue est représentatif de la manière dont le roi et son entourage voulaient…

Rigaud et les portraits royaux

Rigaud et les portraits royaux

La consécration officielle

Installé à Paris en 1681, le peintre Hyacinthe Rigaud (1659-1743) se forge rapidement une clientèle de prestige. En…

Rigaud et les portraits royaux
Rigaud et les portraits royaux
Rigaud et les portraits royaux
Les redditions

Les redditions

Général invaincu depuis Toulon malgré quelques victoires douteuses comme Marengo, Napoléon grâce à ses talents militaires fut en mesure d’écraser…

Les redditions
Les redditions