Aller au contenu principal
Exode de civils français sur une route de campagne.

Exode de civils français sur une route de campagne.

Date de création : 1940

Date représentée : 01-juin-40

Domaine : Photographies

© BPK, Berlin, Dist RMN - Grand Palais - image BPK

http://www.photo.rmn.fr

11-527663

L’exode

Date de publication : mai 2013

Auteur : Alexandre SUMPF

Montrer la défaite et l’exode.

Après la percée de Sedan du 13 mai 1940 et la victoire de l’armée allemande lors de la bataille de France (mai-juin 1940), huit à dix millions de civils français envahissent les routes, décidés à fuir l’ennemi. Parmi les soldats français en retraite, ces « exodiens » (Jean-Pierre Azéma) sont présents sur tout le territoire, particulièrement dans le nord et l’est du pays. S’ils prennent parfois la direction du sud et de l’ouest, ils errent souvent aussi sans but précis. Effectué majoritairement à pied (mais aussi en charrette, en vélo ou plus rarement en engin motorisé), ce gigantesque mouvement de masse appelé « Exode », souvent chaotique, dure jusqu’à la fin du mois de juin.

Prises ou tournées par des particuliers, par les nazis ou encore par l’armée française, de très nombreuses images largement diffusées par les médias de tous les pays immortalisent l’épisode, à l’instar de « Exode de civils français sur une route de campagne », cliché datant du 1er juin 1940 et vraisemblablement pris par un photographe allemand.

Au-delà de leur valeur documentaire et stratégique (touchant au contrôle et à la connaissance de ces flux massifs), ces clichés ont aussi une valeur symbolique capitale. En montrant la déroute, la défaite et le désordre, elles marquent les consciences et les représentations des vaincus comme des vainqueurs. L’interprétation des images de ce bouleversement annonciateur d’une nouvelle ère et d’un nouveau monde acquiert alors un rôle fondamental pour la suite des événements dans la France occupée.

Ligne de fuite

Prise en juin 1940, la photographie « Exode de civils français sur une route de campagne » donne à voir une véritable ligne de fuite, au sens pictural et littéral. Jouant de la perspective obtenue par la profondeur de champ, l’auteur du cliché compose trois axes verticaux parallèles qui structurent l’ensemble de l’image.

À gauche pour le spectateur, une voie ferrée légèrement courbe s’enfonce au loin dans le paysage. Déployée sur une sorte de talus herbeux, elle semble désuète, peut-être hors d’usage, ou en tout cas présentement inutile.

Au centre et sur la route, la file de civils qui fuient est majoritairement composée d’enfants (premier plan) et de femmes, même si l’on aperçoit une silhouette masculine au second plan. Portant des vêtements sombres (du moins colorés comme tels à partir du noir et blanc initial de la photographie), les personnages font contraste avec la lumière et les couleurs (blanc de la route, vert de la végétation) caractérisant le reste de la scène. Ils transportent les quelques rares effets (couvertures, parapluie, etc.) qu’ils ont pu emporter dans des brouettes, un landau, ou à la main. Si le nombre de ceux qui fuient (on en devine une dizaine) est ici assez modeste par rapport à d’autres images connues de l’exode, le défilé ne semble pas devoir s’interrompre, qui s’étend jusqu’à l’arrière-plan.
Un rang de jeunes arbres dessine enfin une dernière ligne de perspective, qui s’ouvre sur un paysage assez nu de pré en herbes, rehaussé au fond par quelques collines lointaines.

Le chemin de l’exode


À la différence de nombreux clichés consacrés à cet événement, « Exode de civils français sur une route de campagne » ne présente pas une image chaotique de l’exode. Le paysage champêtre, ensoleillé et presque paisible qui accueille la scène ainsi que le nombre restreint de personnages photographiés laissent en effet une impression d’espace et de tranquillité relative, loin des bousculades, de l’engorgement et de la panique. Les civils qui fuient semblent ainsi devoir poursuivre régulièrement et avec détermination leur progression sur la route.

Cependant, la file de ces exilés a quelque chose de spectral, qui égraine des silhouettes sombres et chargées en ce jour lumineux. Leur présence mouvante dans ce paysage tranquille et désert apparaît alors d’autant plus incongrue dans le cadre serein décrit précédemment : la scène devient véritablement une scène d’exode, qui porte plusieurs des caractéristiques du genre.

Les détails qui apparaissent alors (les affaires sûrement choisies dans la précipitation et au hasard, emportées comme on le peut) révèlent en effet dans un second temps les conditions de désarroi propres à de la fuite, tandis que le flux ténu mais ininterrompu des personnages rappelle l’ampleur du phénomène.

 

· Jean-Pierre AZÉMA, Nouvelle histoire de la France contemporaine, tome XIV « De Munich à la Libération, 1938-1944 », Paris, Le Seuil, coll. « Points Histoire », 1979, nouv. éd. 2002.

· Jean-Pierre AZÉMA et François BÉDARIDA (dir.), 1938-1948, Les Années de tourmente. De Munich à Prague : Dictionnaire critique, Paris, Flammarion, 1995.

· Pierre MIQUEL, L’Exode : 10 mai-20 juin 1940, Paris, Pocket, 2005.

Alexandre SUMPF, « L’exode », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 28/03/2024. URL : histoire-image.org/etudes/exode

Anonyme (non vérifié)

La troisième république s'effondre alors dans la fange de sa médiocrité, de ses mensonges et de ses lâchetés...

sam 04/05/2013 - 08:38 Permalien

Ajouter un commentaire

HTML restreint

  • Balises HTML autorisées : <a href hreflang> <em> <strong> <cite> <blockquote cite> <code> <ul type> <ol start type> <li> <dl> <dt> <dd> <h2 id> <h3 id> <h4 id> <h5 id> <h6 id>
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.
  • Les adresses de pages web et les adresses courriel se transforment en liens automatiquement.
CAPTCHA
Cette question sert à vérifier si vous êtes un visiteur humain ou non afin d'éviter les soumissions de pourriel (spam) automatisées.

Mentions d’information prioritaires RGPD

Vos données sont sont destinées à la RmnGP, qui en est le responsable de traitement. Elles sont recueillies pour traiter votre demande. Les données obligatoires vous sont signalées sur le formulaire par astérisque. L’accès aux données est strictement limité aux collaborateurs de la RmnGP en charge du traitement de votre demande. Conformément au Règlement européen n°2016/679/UE du 27 avril 2016 sur la protection des données personnelles et à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée, vous bénéficiez d’un droit d’accès, de rectification, d’effacement, de portabilité et de limitation du traitement des donnés vous concernant ainsi que du droit de communiquer des directives sur le sort de vos données après votre mort. Vous avez également la possibilité de vous opposer au traitement des données vous concernant. Vous pouvez, exercer vos droits en contactant notre Délégué à la protection des données (DPO) au moyen de notre formulaire en ligne ( https://www.grandpalais.fr/fr/form/rgpd) ou par e-mail à l’adresse suivante : dpo@rmngp.fr. Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter notre politique de protection des données disponible ici en copiant et en collant ce lien : https://www.grandpalais.fr/fr/politique-de-protection-des-donnees-caractere-personnel

Partager sur

Découvrez nos études

La guerre juste

La guerre juste

Le choc des cultures

Dans une nation moins déchristianisée que la France, où la foi ne constitue pas le principe de ralliement d’un parti (comme…

La guerre juste
La guerre juste
La guerre juste
Dénoncer la collaboration

Dénoncer la collaboration

L’exposition « Kollaboration ».

Dans la ville de Tunis libérée en mai 1943, les membres de l’organisation Combat (le plus grand des huit…

Dénoncer la collaboration
Dénoncer la collaboration
Les femmes des FTP-MOI

Les femmes des FTP-MOI

Le défilé du 29 août 1944 à Marseille vu par un témoin privilégié

Quatre jours après le débarquement en Provence qui commence le 15 août 1944, le…

La Flotte assassinée : Mers el-Kébir

La Flotte assassinée : Mers el-Kébir

L’armée française neutralisée

Le 3 juillet 1940, sous l’objectif d’une caméra des actualités et d’un photographe anonyme, la flotte française…

La Flotte assassinée : Mers el-Kébir
La Flotte assassinée : Mers el-Kébir
La bataille de Berlin

La bataille de Berlin

Quand l’Armée Rouge prend Berlin.

Ultime combat mené contre la Wehrmacht, la Bataille de Berlin qui se déroule du 16 avril au 2 mai 1945 achève…

La bataille de Berlin
La bataille de Berlin
La bataille de Berlin
Les artistes sous l’Occupation : Joséphine Baker

Les artistes sous l’Occupation : Joséphine Baker

Joséphine Baker à Paris en 1940

Chanteuse, danseuse et meneuse de revue, Joséphine Baker (1906-1975) connaît un immense succès en France dans les…

Le Mauvais camp

Le Mauvais camp

Le camp d’en face

Si Léon Trotski, assassiné à Mexico le 21 août 1940, avait pu voir enfin dénoncée la violence stalinienne, chiffres à l’appui,…

Le Mauvais camp
Le Mauvais camp
Hitler à Paris

Hitler à Paris

La « Blitz Besuch » (visite éclair)

L’armistice franco-allemand est signé le 22 juin 1940. La moitié nord et la côte atlantique du territoire…

Hitler à Paris
Hitler à Paris
Le débarquement de Normandie – 6 juin 1944

Le débarquement de Normandie – 6 juin 1944

Opération « Overlord »

C’est au cours de l’année 1943 que les Anglais, les Américains et les Canadiens décident de lancer une opération de grande…

Le débarquement de Normandie – 6 juin 1944
Le débarquement de Normandie – 6 juin 1944
Le débarquement de Normandie – 6 juin 1944
Jean Daligault, un artiste détenu

Jean Daligault, un artiste détenu

La Résistance, des armes au dessin

Né à Caen en 1899, Jean Daligault entre dans les ordres en 1917 et est ordonné prêtre en 1924. Également peintre…

Jean Daligault, un artiste détenu
Jean Daligault, un artiste détenu