Aller au contenu principal
La construction de la Tour Eiffel vue de l'une des tours du Palais du Trocadéro.

La construction de la Tour Eiffel vue de l'une des tours du Palais du Trocadéro.

Embrasement de la Tour Eiffel pendant l'Exposition universelle de 1889.

Embrasement de la Tour Eiffel pendant l'Exposition universelle de 1889.

La Tour Eiffel. Projet d'illumination pour l'Exposition internationale de 1937

La Tour Eiffel. Projet d'illumination pour l'Exposition internationale de 1937

La Tour Eiffel illuminée des lettres de Citroën.

La Tour Eiffel illuminée des lettres de Citroën.

La construction de la Tour Eiffel vue de l'une des tours du Palais du Trocadéro.

La construction de la Tour Eiffel vue de l'une des tours du Palais du Trocadéro.

Auteur : FEAU Théophile

Lieu de conservation : musée d’Orsay (Paris)
site web

Date de création : 1888

Date représentée : 1888-1889

Domaine : Photographies

© Photo RMN - Grand Palais - R. G. Ojeda

http://www.photo.rmn.fr

96CE184 / Pho 1981-126-8

Visions de la Tour Eiffel

Date de publication : Mars 2016

Auteur : Ivan JABLONKA

La tour Eiffel, symbole de Paris et de la France, paraît intemporelle. Mais l’unanimité que suscitent aujourd’hui ses 321 mètres donnent lieu ne doit pas faire oublier qu’elle a une histoire et que son édification au cœur de la capitale, à l’occasion de l’Exposition universelle de 1889, alimenta de très vives polémiques. Quand il soumet aux autorités son projet d’une tour de “ plus de mille pieds ”, Gustave Eiffel n’est plus un novice. Il a déjà construit la gare de Budapest, la charpente de la statue de la Liberté à New York et un pont sur le Douro au Portugal. En 1884, il a déposé un brevet “ permettant de construire des piles et des pylônes d’une hauteur pouvant dépasser 300 mètres ”. Soutenue par les édiles et le commissaire général de l’Exposition, la construction de la Tour est entreprise en 1887. Inaugurée en mars 1889, elle reçoit deux millions de visiteurs lors de l’Exposition universelle.

La tour Eiffel connaît immédiatement une “ rapide et considérable fortune iconographique ” : aisément reconnaissable à sa forme, dominant tout Paris, elle est omniprésente sur les cartes postales. Il est donc intéressant de voir comment sa représentation évolue à travers le temps. En 1887 et 1888, Théophile Féau a pris une série de clichés retraçant sa construction. On la voit ainsi s’élever progressivement dans le ciel parisien, édification d’autant plus fascinante qu’elle n'a duré que deux ans. Dans la gravure de Georges Garen, la Tour embrasée en 1889 ridiculise par sa taille et foudroie de ses faisceaux lumineux les immeubles parisiens, en même temps qu’elle charme par son élégance, étant “ d’une simplicité extrême de formes, d’une rigueur dépouillée, semblable à elle-même sous tous ses angles ” (J. Jenger, Souvenirs de la tour Eiffel, p.9). Le dessin à la gouache d’André Granet, exécuté près de cinquante ans plus tard, renverse la perspective habituelle tout en reprenant la vision féerique de la Tour brillant de mille feux : cette fois-ci, le spectateur ne voit pas le monument émerger au-dessus de la Seine, mais il est précipité entre ses piliers, dans une vertigineuse contre-plongée. Sur la photo des années 1920, la Tour, tout habillée des lettres lumineuses du mot Citroën, se détache sur un ciel nocturne tourmenté de nuages, plaçant sous les yeux de tous et portant aux nues le nom du célèbre contructeur automobile. De structure métallique audacieuse sortant inéluctablement de terre, la tour Eiffel est devenue le symbole de la modernité.

Cette évolution peut être mise en parallèle avec les significations successives que la Tour a revêtues. A l’époque, elle avait “ tout pour diviser ; impie, républicaine, métallique, commémorant la Révolution, célébrant l’art des ingénieurs, elle heurtait esthétiquement, politiquement, religieusement ”(H. Loyrette, “ La tour Eiffel ”, in P. Nora (sous la direction de) Les Lieux de mémoire, tome III “ Les France ”, p.4272). Au moment de sa construction, elle est décriée dans une “ protestation ” publique par 47 artistes, parmi lesquels Maupassant, Gérôme, Garnier et Gounod, qui voient dans “ l’inutile et monstrueuse tour Eiffel [une] gigantesque et noire cheminée d’usine ”. Dans les deux camps, en effet, la Tour est associée à l’industrialisation et à l’âge du fer. Il existait déjà des constructions métalliques, comme les Halles centrales de Baltard, mais l’utilisation de l’acier à la place de la fonte, l’évidement des surfaces, l’emploi des poutres à caissons constituent une prouesse technique qui en séduit plus d’un. Eiffel lui-même vante l’esthétique architecturale qui confère à sa Tour une “ grande impression de force et de beauté ”. En 1889, dans La Revue des Deux Mondes, de Vogüé salue de même la “ victoire de la Science et de l’Industrie par un monument triomphal ”. Cette valeur explique que de nombreux peintres modernes, entre autres Seurat, le douanier Rousseau, Chagall et surtout Delaunay, se soient attachés à la Tour, et que Citroën en ait fait un support publicitaire, particulièrement adapté à l’ère des masses. C’est pourquoi elle est aussi une expression de la France industrielle et de la République triomphante : antagoniste du Sacré-Cœur bâti après la défaite de 1871, monument laïc et démocratique, objet de fierté nationale, la tour Eiffel est un hymne au progrès technique, au temps où “ l’optimisme officiel tenait pour solidaires ce progrès-là et les autres progrès ” ( Histoire de la France urbaine, p.630) scientifiques, spirituels et politiques.

Jean JENGER Souvenirs de la Tour Eiffel Ed. RMN, 1989.

Maurice AGULHON (dir.) Histoire de la France urbaine , t.4, La ville de l’âge industriel. Le cycle haussmannien Seuil, Points, 1998.

Henri LOYRETTE  La tour Eiffel, in Pierre Nora (dir.) Les Lieux de mémoire , tome III “ Les France ”Paris, Gallimard, 1992.

 

Ivan JABLONKA, « Visions de la Tour Eiffel », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 19/03/2024. URL : histoire-image.org/etudes/visions-tour-eiffel

Ajouter un commentaire

HTML restreint

  • Balises HTML autorisées : <a href hreflang> <em> <strong> <cite> <blockquote cite> <code> <ul type> <ol start type> <li> <dl> <dt> <dd> <h2 id> <h3 id> <h4 id> <h5 id> <h6 id>
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.
  • Les adresses de pages web et les adresses courriel se transforment en liens automatiquement.
CAPTCHA
Cette question sert à vérifier si vous êtes un visiteur humain ou non afin d'éviter les soumissions de pourriel (spam) automatisées.

Mentions d’information prioritaires RGPD

Vos données sont sont destinées à la RmnGP, qui en est le responsable de traitement. Elles sont recueillies pour traiter votre demande. Les données obligatoires vous sont signalées sur le formulaire par astérisque. L’accès aux données est strictement limité aux collaborateurs de la RmnGP en charge du traitement de votre demande. Conformément au Règlement européen n°2016/679/UE du 27 avril 2016 sur la protection des données personnelles et à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée, vous bénéficiez d’un droit d’accès, de rectification, d’effacement, de portabilité et de limitation du traitement des donnés vous concernant ainsi que du droit de communiquer des directives sur le sort de vos données après votre mort. Vous avez également la possibilité de vous opposer au traitement des données vous concernant. Vous pouvez, exercer vos droits en contactant notre Délégué à la protection des données (DPO) au moyen de notre formulaire en ligne ( https://www.grandpalais.fr/fr/form/rgpd) ou par e-mail à l’adresse suivante : dpo@rmngp.fr. Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter notre politique de protection des données disponible ici en copiant et en collant ce lien : https://www.grandpalais.fr/fr/politique-de-protection-des-donnees-caractere-personnel

Partager sur

Découvrez nos études

Revue de la Garde nationale, attentat de Fieschi

Revue de la Garde nationale, attentat de Fieschi

Un attentat meurtrier

Louis-Philippe, durant tout son règne, fut l’objet de multiples tentatives d’assassinat. L’une des plus spectaculaires, et…

La traite des planches ou La prostitution au spectacle

La traite des planches ou La prostitution au spectacle

La traite des planches ou la prostitution au spectacle.

Le dessin de Degas comme la photographie de la vedette Polaire attestent l’engouement…

La traite des planches ou La prostitution au spectacle
La traite des planches ou La prostitution au spectacle
Nice. Place Masséna à l'angle de l'avenue de Verdun

Nice. Place Masséna à l'angle de l'avenue de Verdun

Le développement du tourisme au XIXe siècle a provoqué une forte croissance démographique des stations thermales ou balnéaires. Les villes du…
Delft par Johannes Vermeer

Delft par Johannes Vermeer

L’histoire mouvementée de la paisible ville de Delft

L’histoire de Delft est plus mouvementée que ne le laisse imaginer la paisible vue qu’en a…

La Grande roue de Paris

La Grande roue de Paris

L’Exposition Universelle : De l’industrie aux loisirs de masse

En 1855, se tient à Paris la première Exposition Universelle, quatre ans après…

Les Tramways électriques dans les villes françaises

Les Tramways électriques dans les villes françaises

Pendant longtemps, la ville a été de dimensions restreintes et l’essentiel des déplacements s’y faisait à pied. La ville était adaptée aux piétons…

Les Tramways électriques dans les villes françaises
Les Tramways électriques dans les villes françaises
Les Tramways électriques dans les villes françaises
Le vieux Paris - la photographie documentaire

Le vieux Paris - la photographie documentaire

Mutations urbaines

« Dehors, des thèmes populaires finement écrits pour des instruments variés, depuis la corne du raccommodeur de porcelaine ou…

Le vieux Paris - la photographie documentaire
Le vieux Paris - la photographie documentaire
Le vieux Paris - la photographie documentaire
Le chemin de fer, symbole d’une nouvelle révolution industrielle

Le chemin de fer, symbole d’une nouvelle révolution industrielle

Symbole de la révolution industrielle naissante, le chemin de fer se développe en France à partir des années 1820. Longtemps considéré comme une…

Inauguration de la statue équestre d'Henri IV sur le Pont-Neuf, 25 août 1818

Inauguration de la statue équestre d'Henri IV sur le Pont-Neuf, 25 août 1818

La gloire d’Henri le Grand

La légende dorée d’Henri IV avait, dans les arts plastiques, connu un vigoureux regain au XVIIIe siècle, en particulier…

Le Mobilier urbain, un symbole de Paris

Le Mobilier urbain, un symbole de Paris

Des colonnes dans la rue

La multiplication des lieux de divertissement tels que les théâtres ou les cirques sur les boulevards au cours du XIX…