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Graphisme pour l'Enseigne de sortie, édicule B

Graphisme pour l'Enseigne de sortie, édicule B

Mange-moi

Mange-moi

Graphisme pour l'Enseigne de sortie, édicule B

Graphisme pour l'Enseigne de sortie, édicule B

Auteur : GUIMARD Hector

Lieu de conservation : musée d’Orsay (Paris)
site web

Date de création : Vers 1901

H. : 42 cm

L. : 140 cm

Aquarelle sur esquisse à la mine de plomb sur papier calque

Domaine : Dessins

© Musée d'Orsay, dist. RMN - Grand Palais / Patrice Schmidt

Lien vers l'image

01-017268 / GP 1885

Le métro selon Hector Guimard

Date de publication : Mars 2020

Auteur : Alexandre SUMPF

Paris, œuvre d’art

Cliché fermement associé à la ville de Paris, sans cesse renouvelé par le cinéma ou les reportages télé, le « style nouille » caractérisant les premières stations de métro parisien est dû à l’imagination d’Hector Guimard.

L’architecte, fer de lance de l’Art nouveau en France, a la particularité d’avoir fait les Arts décoratifs dans les années 1880 et de s’être un temps destiné à l’École des beaux-arts. Ayant échoué au prix de Rome comme d’ailleurs à son diplôme d’architecte, il se lance tout de même dans la carrière. Remarqué pour son pavillon de l’Électricité à l’Exposition universelle de 1889, très fréquenté, il participe à de vastes programmes immobiliers dans les nouveaux quartiers de Paris. En 1895, un voyage à Bruxelles lui fait découvrir l’Art nouveau. Il rentre à Paris, inspiré par l’hôtel Tassel imaginé par Victor Horta, et révolutionne l’ornementation du Castel Béranger en voie d’achèvement. Sa conversion à la volute et au « coup de fouet » est spectaculaire, tout autant que sa frénésie créatrice. Le succès de cette réalisation le rend brutalement célèbre, lui permettant non seulement de bâtir des hôtels particuliers à Auteuil, mais de remporter le concours pour la marque visuelle du nouveau métro… alors qu’il ne s’y était pas présenté.

Les cent soixante-sept ouvrages imaginés par Guimard à partir d’éléments modulables en fonte moulurée ont été achevés en 1913. Les treize grands édicules et les cent cinquante-quatre entourages simples signalent et symbolisent le paysage parisien, dans tous les quartiers, sous tous les climats, de jour comme de nuit.

Cette nuit parisienne où brillent les globes lumineux oranges des stations de métro, Gyula Halász, dit Brassaï, la connaît parfaitement. Le photographe, né en Hongrie, est arrivé en 1924 à Montparnasse, où il fréquente la bohème artistique – notamment Jacques Prévert, poète de l’urbain populaire, et Henry Miller. Son pseudonyme, composé à partir de Brassó, sa ville de naissance, devient célèbre lorsqu’il publie l’ouvrage de photographies Paris de nuit en 1932. Ses scènes à la fois vivantes et composées, ses angles originaux, ses personnages de femmes solitaires et les contrastes poussés de ses clairs-obscurs deviennent iconiques.

Une poétique du quotidien

Le fonds Guimard du musée d’Orsay rassemble des centaines de dessins réalisés par l’artiste en quelques années à peine. Certains, traitant des structures et comportant parfois des cotes, tiennent plutôt de l’architecture. D’autres, comme Graphisme pour l’enseigne de sortie, édicule B, se concentrent sur ce que l’on nommerait aujourd’hui le design.

Le panneau, appelé à être reproduit des centaines de fois sur les quais, retravaille la géométrie naturelle des lettres majuscules d’axe vertical en lui apportant de la souplesse, débridée en apparence. En réalité, plusieurs principes commandent cette transformation : les formes tronquées (O, T), l’emploi des pleins (S, E) et le recours à des appendices sinueux inspirés de l’écriture cursive. Le jeu avec le cadre, dont ressortent deux apex et la queue du R, dynamise une série de lettres à vocation fonctionnelle – d’où le choix du noir sur fond jaune et de l’épaisseur, les rehauts de blanc pour laisser imaginer les effets de lumière.

Guimard a aussi laissé nombre de croquis de fonte travaillant précisément les détails de l’ornementation des édicules et des entourages. Son vocabulaire ornemental est influencé par le végétal. Ses arabesques ont inspiré Brassaï pour la série intitulée Avez-vous vu l’entrée du métro de Paris ? Le cliché Mange-moi répond à cette question moins anodine qu’il n’y paraît. En effet, si les premiers voyageurs et les touristes qui débarquent à Paris sont frappés par ce style, plus personne n’y prête attention dans ses déplacements quotidiens. Le photographe choisit à dessein un gros plan frontal qui isole l’ornementation de son contexte et donne une tonalité onirique à cet objet étrange, comme venu d’ailleurs, presque merveilleux. La lumière nocturne qui se reflète dans le métal fait hésiter quant à la matière : elle semble avoir la dureté de la pierre et la souplesse de la chair.

Le métro de Paris, une marque

En dépit des négociations tendues sur les questions financières, Guimard n’a pas hésité quand la Compagnie du Métropolitain s’est adressée à lui, déçue du manque d’originalité des projets reçus pour l’identité visuelle du métro.

Avec cette commande, le jeune artiste peut réaliser à grande échelle la jonction entre la singularité de l’Art nouveau et le principe de l’ornement structurel de Viollet-le-Duc. L’architecte cherche d’abord à populariser le nouveau style qu’il vient de découvrir et qui se propage à toute vitesse en Europe. À l’image d’Otto Wagner à Vienne ou de Horta à Bruxelles, il lie réflexion sur les structures et design de tous les éléments. Cet art, en rupture avec le classicisme, se répand d’une capitale à l’autre et marque leur entrée dans le XXe siècle. La nouvelle architecture s’affranchit des normes et des conventions ; elle préfère la vie à la monumentalité, la plasticité à la rigidité. Les commanditaires ne se sont pas trompés : utile et très fréquenté, le nouveau moyen de transport séduit les usagers par cette touche moderne et ce style souvent décrié, mais jamais imité.

Si la première guerre mondiale stoppe l’essor de l’Art nouveau et crée une rupture importante dans les arts européens, la liberté, le hasard, la civilisation urbaine font partie des principes chers aux avant-gardes de l’entre-deux-guerres, surréalistes en tête. Le rejet des sujets traditionnels de l’art officiel – batailles, grands hommes – explique que la nature soit un sujet privilégié, signe de modernité.

Le gros plan préféré à la vue d’ensemble est ici symptomatique d’un choix aussi politique qu’esthétique. Brassaï s’inspire semble-t-il de la photographie scientifique, qui fait découvrir ce que l’on ne voit pas habituellement ; il adopte une démarche d’entomologiste et relativise le geste créateur avec une certaine ironie.

D’un autre côté, le photographe exalte le singulier dans la répétition, révèle au public un autre univers sous l’apparente banalité du quotidien, donne un autre sens à ce symbole de la modernité parisienne. Ce jeu avec la réalité sensible, typique du modernisme, est permis par la réflexion même de Guimard qui, en travaillant le lettrage des panneaux et le style des édicules, a créé une triple marque de fabrique inimitable : la sienne, celle du métropolitain et celle de la capitale française.

DESCOUTURELLE Frédéric, MIGNARD André, RODRIGUEZ Michel, Guimard : l’art nouveau du métro, Paris, La Vie du Rail, 2012.

GAUTRAND Jean-Claude, Brassaï, Paris, Paris, Taschen, 2004.

GUERRAND Roger-Henri, L’aventure du métropolitain, Paris, La Découverte, coll. « Poche : essais », 1999 (1re éd. 1986).

Art nouveau : Style qui se développe dès la fin du XIXe siècle, d’abord en Belgique et en France. Il s’épanouit dans l’architecture et dans les arts décoratifs. La recherche de fonctionnalité est une des préoccupations de ses architectes et designers. L’Art nouveau se caractérise par des formes inspirées de la nature, où la courbe domine.

Apex : Sommet, pointe.

Prix de Rome : Pension royale attribuée au terme d’un concours organisé par l’Académie à partir de 1663 et qui permettait aux lauréats de séjourner à l’Académie de France à Rome, installée à la villa Médicis en 1803.

Exposition universelle : Présentation publique durant laquelle des produits de l’art et de l’industrie du monde entier sont exposés. La première a eu lieu à Londres en 1851.

Alexandre SUMPF, « Le métro selon Hector Guimard », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 24/04/2024. URL : histoire-image.org/etudes/metro-hector-guimard

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