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Maternité

Maternité

Maternité à la fenêtre

Maternité à la fenêtre

Le Berceau

Le Berceau

Maternité

Maternité

Auteur : CARRIERE Eugène

Lieu de conservation : musée d’Orsay (Paris)
site web

Date de création : Vers 1887

Date représentée :

H. : 33 cm

L. : 40,2 cm

Huile sur toile

Domaine : Peintures

© GrandPalaisRmn (musée d'Orsay) / Mathieu Rabeau

Lien vers l'image

RF 3115 - 19-500468

L’amour maternel au XIXe siècle

Date de publication : Mars 2016

Auteur : Ivan JABLONKA

L’historien Philippe Ariès a décrit le processus par lequel, au XVIIIe siècle, l’enfant devient un être digne d’intérêt, avec des besoins et une personnalité propres. Cette évolution se lit notamment dans les soins dont les parents entourent dorénavant leur enfant, dans la tendresse qu’ils lui témoignent et dans le souci qu’ils ont de sa santé et de son éducation.

Commencée sous l’Ancien Régime, la découverte de l’enfance se poursuit à l’époque contemporaine. « Au XIXe siècle, l’enfant est, plus que jamais, au centre de la famille. Il est l’objet d’un investissement de tous ordres » : affectif, culturel, éducatif, économique (M. PERROT, « L’enfance révolutionnée par la Révolution ? Parents et enfants au XIXe siècle », in M.-F. LÉVY (dir.), L’Enfant, la Famille et la Révolution française, Olivier Orban, 1990, p. 406-407).

Cette affirmation est particulièrement vraie pour la Belle Époque. La Société française de pédiatrie est fondée en 1899 ; deux « best-sellers », Claudine à l’école, de Colette (1900), et La Guerre des boutons de Louis Pergaud (1912), ont pour héros des enfants.

L’éducation des enfants n’en demeure pas moins exigeante et pleine de sévérité. Les châtiments corporels comme le fouet, la fessée, ou les peines plus « douces » comme la privation de repas sont largement perçus comme une méthode éducative. Mais, de manière générale, les parents témoignent à leur progéniture une attention nouvelle.

Exécutées dans la seconde moitié du siècle, les peintures reproduites ici sont autant d’hymnes à l’amour maternel. Chacune de ces icônes de la maternité, variations modernes sur le thème de la Vierge à l’Enfant, présente une facette du lien affectif et physique qui unit la maman à son bébé.

Dans sa Maternité, Eugène Carrière peint le tendre jeu d’une jeune femme et de son nourrisson : celui-ci tend sa petite main vers le visage de sa mère qui le berce. Le face-à-face charmant des deux êtres, les sfumato de gris et de noir qui les enveloppent, le velouté des couleurs et l’unité de la palette concourent à l’intimité de cette scène.

Avec une plus grande vivacité, Maurice Denis représente sa femme avec leur deuxième fille. La jeune mère, qui a pris son enfant dans les bras, l’embrasse à pleine bouche devant une fenêtre grande ouverte.

Dans Le Berceau de l’impressionniste Berthe Morisot, dont l’univers est proche de celui de l’Américaine Mary Cassatt, une jeune mère (la sœur de l’artiste, Edma) veille tendrement sur le sommeil de son enfant. Les trois-quarts de la toile sont occupés par le berceau blanc qui enveloppe le bébé d’une gaze de pureté. À côté, la jeune femme l’observe rêveusement : sa contemplation silencieuse et émerveillée contraste avec les instantanés des impressionnistes.

Ces toiles évoquent la profonde intimité qui unit la mère à son enfant, thème déjà traité au XVIIIe siècle par Élisabeth Vigée-Lebrun, de manière plus conventionnelle peut-être. Elles reflètent la découverte de la douceur, l’épanouissement d’une vocation maternelle, la popularisation des caresses et des baisers de la mère à l’enfant, déjà recommandés par Rousseau dans l’Émile.

De nombreuses ambiguïtés subsistent cependant, qui viennent nuancer ce modèle. Le placement du bébé en nourrice à la campagne, signe d’un certain désintérêt pour le nourrisson, est une pratique encore massive à la fin du siècle et qui ne disparaîtra qu’avec la Grande Guerre.

Dans les familles bourgeoises, le bébé est confié à une nourrice à domicile, dite « sur lieu ». Au total, à Paris, dans les années 1860, près d’un nouveau-né sur deux n’est pas élevé directement par sa mère.

D’autre part, entre le recours à la nourrice et l’usage du biberon, l’allaitement maternel reste rare.

Enfin, lorsque l’enfant grandit, l’affirmation des soins maternels peut aussi correspondre à un refus de l’instruction, notamment pour les filles. Au XIXe siècle, celles-ci seront souvent « implicitement renvoyées à leur mère » , comme pendant la Révolution, avant que les plus favorisées d’entre elles bénéficient des lois votées au début des années 1880 sous l’influence de Camille See. Ces trois œuvres sont donc aussi révélatrices des ambiguïtés de la période.

Marie-Françoise LÉVY (dir.), L’Enfant, la Famille et la Révolution française, Paris, Olivier Orban, 1990.

Jean-Noël LUC, L’Invention du jeune enfant au XIXe siècle : de la salle d’asile à l’école maternelle, Paris, Belin, 1997.

Catherine ROLLET, La Politique à l’égard de la petite enfance sous la IIIe République, Paris, INED, PUF, 1990.

Catherine ROLLET, Les Enfants au XIXe siècle, Hachette, La Vie quotidienne, 2001.

Ivan JABLONKA, « L’amour maternel au XIXe siècle », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 19/03/2024. URL : histoire-image.org/etudes/amour-maternel-xixe-siecle

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