Aller au contenu principal
Ma maman.

Ma maman.

Date de création : 1916

Date représentée : 1916

H. : 5 cm

L. : 6,54 cm

lithographie

Domaine : Estampes-Gravures

© Collection Historial de la Grande Guerre - Péronne (Somme) - Photo Yazid Medmoun

http://www.historial.org/fr/renseign/doc.htm

165

Les victimes civiles de la guerre de 1914-1918

Date de publication : Mars 2016

Auteur : Sophie DELAPORTE

Le viol des femmes françaises par les soldats allemands semble avoir été, dès les premières semaines de la guerre de 1914-1918, un acte très répandu. Partiellement ou totalement envahis par l’ennemi, plusieurs départements furent évacués après la bataille de la Marne : les viols y furent semble-t-il nombreux, même si aucune statistique n’est disponible sur ce point.

Les rapports de la Commission d’enquête mise en place dès septembre 1914 en vue de constater les « actes commis par l’ennemi en violation du droit des gens » ont accordé une large place à cette question en incluant les dépositions des victimes et de leurs témoins. L’impact du premier rapport, rédigé en décembre 1914 et publié en janvier 1915 par la presse française, fut considérable dans le pays. En fait, les violences infligées aux femmes constituèrent un des points d’ancrage du discours français sur les atrocités allemandes et achevèrent de convaincre l’opinion française de la barbarie de l’adversaire.

Dans ce dessin reproduit sous la forme de cartes postales et d’affiches grand format, deux outils de large diffusion de la propagande anti-allemande, Abel Faivre recourt à un procédé graphique très elliptique : il montre, au premier plan, dans la pièce, une petite fille en pleurs, debout devant une porte fermée. Un peu en retrait, une chaise renversée sur laquelle se trouvent, négligemment jetés, l’uniforme, le casque et le sabre d’un officier allemand. Sur un mur à l’arrière-plan, le portrait du père de famille, absent, et donc impuissant à intervenir et à empêcher le drame. Le portrait souligne la dimension de profanation du cadre familial.

La légende tient en deux mots : « Ma maman. » L’acte n’est donc pas représenté directement. Il est simplement suggéré, ce qui donne toute sa force au dessin. L’enfant n’a ici qu’une représentation auditive de l’abus sexuel subi par sa mère.

Le viol est ici un acte individuel. Il n’est pas le fait d’un groupe de soldats. Le plus souvent, les scènes de viol se déroulent dans la sphère intime. Dans leurs témoignages, les femmes violées ont souvent mentionné les cris et les pleurs de leurs enfants, qui forment la toile de fond des récits sur la violence ennemie.

L’expérience des premiers mois de guerre est d’abord celle de la violence inouïe des combats, qui prend en août 1914 une forme extrême jusque-là inconnue. Le viol des femmes s’inscrit dans le contexte plus large des atrocités commises par les Allemands sur les champs de bataille. Mais il consacre aussi la réalité de la conquête et de l’invasion du pays. En ce sens, il symbolise l’humiliation infligée à la nation.

À noter ici l’ambiguïté de la représentation : le « violeur » pourrait aussi avoir obtenu le consentement de sa « victime », ce que tendent à suggérer l’absence de désordre dans la pièce et l’enfermement du couple à huis clos dans la chambre. Il pourrait alors s’agir d’un de ces abus commis à la faveur de la constante promiscuité, dans les maisons, entre occupés et occupants. Cette ambiguïté traduit parfaitement l’angoisse qu’inspirent aux hommes les violences faites aux femmes en 14-18 : celle d’une possible trahison des victimes.

Pierre VALLAUD, 14-18, la Première Guerre mondiale, tomes I et II, Paris, Fayard, 2004.

Stéphane AUDOUIN-ROUZEAU, L’Enfant de l’ennemi 1914-1918, Paris, Aubier, 1995.

Sophie DELAPORTE, « Les victimes civiles de la guerre de 1914-1918 », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 19/03/2024. URL : histoire-image.org/etudes/victimes-civiles-guerre-1914-1918

Ajouter un commentaire

HTML restreint

  • Balises HTML autorisées : <a href hreflang> <em> <strong> <cite> <blockquote cite> <code> <ul type> <ol start type> <li> <dl> <dt> <dd> <h2 id> <h3 id> <h4 id> <h5 id> <h6 id>
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.
  • Les adresses de pages web et les adresses courriel se transforment en liens automatiquement.
CAPTCHA
Cette question sert à vérifier si vous êtes un visiteur humain ou non afin d'éviter les soumissions de pourriel (spam) automatisées.

Mentions d’information prioritaires RGPD

Vos données sont sont destinées à la RmnGP, qui en est le responsable de traitement. Elles sont recueillies pour traiter votre demande. Les données obligatoires vous sont signalées sur le formulaire par astérisque. L’accès aux données est strictement limité aux collaborateurs de la RmnGP en charge du traitement de votre demande. Conformément au Règlement européen n°2016/679/UE du 27 avril 2016 sur la protection des données personnelles et à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée, vous bénéficiez d’un droit d’accès, de rectification, d’effacement, de portabilité et de limitation du traitement des donnés vous concernant ainsi que du droit de communiquer des directives sur le sort de vos données après votre mort. Vous avez également la possibilité de vous opposer au traitement des données vous concernant. Vous pouvez, exercer vos droits en contactant notre Délégué à la protection des données (DPO) au moyen de notre formulaire en ligne ( https://www.grandpalais.fr/fr/form/rgpd) ou par e-mail à l’adresse suivante : dpo@rmngp.fr. Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter notre politique de protection des données disponible ici en copiant et en collant ce lien : https://www.grandpalais.fr/fr/politique-de-protection-des-donnees-caractere-personnel

Partager sur

Découvrez nos études

Regard sur l'enfance

Regard sur l'enfance

Le mouvement ouvrier avait été pratiquement annihilé après la loi Le Chapelier de 1791, qui interdisait les corporations et supprimait de fait la…

Les métiers de rue des enfants pauvres

Les métiers de rue des enfants pauvres

La loi du 22 mars 1841 réglementant le travail juvénile ne concerne que les établissements employant plus de vingt salariés. De fait, au moins…

Les métiers de rue des enfants pauvres
Les métiers de rue des enfants pauvres
Les métiers de rue des enfants pauvres
Le travail des enfants dans le Nord en 1901

Le travail des enfants dans le Nord en 1901

Un cadre législatif balbutiant

Le travail des enfants n’est pas une nouveauté du XIXe siècle, mais la révolution industrielle, avec le…

Le travail des enfants dans le Nord en 1901
Le travail des enfants dans le Nord en 1901
Réaliser une utopie : la vie quotidienne au familistère Godin

Réaliser une utopie : la vie quotidienne au familistère Godin

Jean-Baptiste Godin dénonce dans Solutions sociales les limites de la solution mise en place dans le cadre des cités ouvrières de Mulhouse qui…

Réaliser une utopie : la vie quotidienne au familistère Godin
Réaliser une utopie : la vie quotidienne au familistère Godin
Réaliser une utopie : la vie quotidienne au familistère Godin
Le renouveau religieux du milieu du XIX<sup>e</sup> siècle

Le renouveau religieux du milieu du XIXe siècle

Le milieu du XIXe siècle est marqué, dans les pays catholiques occidentaux, et notamment en France, par un nouvel élan religieux qui…

Progrès de la médecine infantile

Progrès de la médecine infantile

A l’aube du XXe siècle, la médecine des enfants semble entrer dans une ère nouvelle, qui va enfin permettre le recul de la mortalité infantile,…

Le conte : entre oralité et écriture

Le conte : entre oralité et écriture

La place du conte au XIXe siècle

L’engouement pour le conte, au XVIIe siècle, correspond à l’intérêt porté à la culture…

Le conte : entre oralité et écriture
Le conte : entre oralité et écriture
Un modèle de l'Instruction républicaine

Un modèle de l'Instruction républicaine

Les débuts de l'école de la IIIe République

Le tableau En classe, le travail des petits a été réalisé par Jean Geoffroy en 1889. L’…

École de jeunes filles en Algérie

École de jeunes filles en Algérie

Un intérêt croissant pour l'Algérie

Après la prise d’Alger par les Français le 5 juillet 1830, la monarchie de Juillet, un temps hésitante,…

Répression de la misère

Répression de la misère

En France, le vagabondage, défini comme un délit dans le code napoléonien de 1804, est réprimé en milieu rural aussi bien qu’en ville.